Vers de meilleures conditions de villes


Milieu complexe, hétérogène, la ville regroupe une multitude d’environnements s’entre-influençant et générant un climat particulier. Pour en saisir le fonctionnement, les chercheurs mesurent et modélisent de nombreux processus physico-chimiques dans l’atmosphère, qui soumettent régulièrement les citadins à des risques sanitaires.

« En Europe, plus de 70% de la population vit en ville et à Paris, plus de 75% de l’agglomération est régulièrement exposée à des niveaux de pollution plus élevés que les valeurs recommandées par les organisations de santé », énonce Simone Kotthaus, chercheuse à l’Institut Pierre-Simon Laplace. Véritable enjeu de santé publique, ses travaux se penchent plus particulièrement sur les conditions climatiques en milieu urbain et leur impact sur la qualité de l’air : « Mon travail se concentre sur les couches basses de l’atmosphère, c’est à ce niveau que les conditions climatiques affectent la vie des humains et que se trouve l’air que nous respirons », précise-t-elle.

Dans ce milieu, les échanges thermiques, physiques et chimiques entre surface et atmosphère sont largement conditionnés par les activités et constructions humaines. Si à la campagne l’atmosphère est rafraîchie par l’évaporation de l’humidité des sols et la transpiration des arbres, ce mécanisme est différent en ville. Les surfaces des bâtiments et des rues dominent, amoindrissent le refroidissement lié à l’évaporation et les matériaux des imperméables des bâtiments absorbent une plus grande partie du rayonnement solaire. A ce milieu déjà plus chaud que la normale s’ajoute la chaleur produite par le trafic, le chauffage et la climatisation liés à la vie quotidienne des citadins. Ainsi, « beaucoup d’effets du changement climatique sont amplifiés en ville », affirme Simone Kotthaus. « En ville, les vagues de chaleur peuvent être plus fréquentes, plus intenses et plus longues, ce qui les rend plus mortelles en ville qu’à la campagne », rappelle-t-elle. Cependant, dans ces espaces très densément peuplés, construits par et pour les humains, la chimie et la dynamique de l’atmosphère sont encore peu appréhendées dans leur complexité. « Ça peut paraître surprenant, mais l’atmosphère urbaine est une des parties les moins observées de l’atmosphère », affirme la chercheuse.

Un système complexe

Les conditions particulières des villes en font des milieux à plus haut risque face au changement climatique et souvent en proie à une forte pollution. Cependant, il existe des moyens concrets pour les adapter au climat futur et atténuer ces impacts négatifs pour y maintenir ou idéalement améliorer les conditions de vie. Que ce soit en créant des îlots de fraîcheur par la végétalisation ou en favorisant la ventilation grâce à l’orientation des rues, l’aménagement est un outil essentiel pour construire des villes résilientes et agréables à vivre. Bien qu’il soit encore difficile d’évaluer l’impact précis de chaque décision d’urbanisme, de grands principes se dégagent et posent de nouvelles questions aux chercheurs : « En réduisant la chaleur des villes, on limite la chaleur en surface qui, selon certains modèles, pourrait atténuer le mouvement vertical qu’on cherche à encourager pour évacuer la pollution vers les hautes couches de l’atmosphère. Il faut analyser minutieusement ces interactions complexes pour s’assurer que réduire les risques liés à la chaleur n’entraîne pas une augmentation accidentelle des niveaux de pollution de l’air », illustre-t-elle.

« Les processus étant très interdépendants, il reste nécessaire de poursuivre l’étude de l’atmosphère urbaine pour pouvoir apporter un éclairage avisé aux aménageurs. » De nouvelles connaissances sur la complexité des systèmes urbains sont continuellement apportées par de nombreux modèles et observations. « Ces dernières années, de grandes avancées ont vu le jour, tant du côté des mesures que des simulations numériques. Ils nous permettent de représenter le système urbain de plus en plus finement », conclut Simone Kotthaus.

Par Marion Barbé pour l’IPSL

 

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