GIEC et climat : ça coule de source


Le message principal du rapport du GIEC sorti en août 2021 n’est pas nouveau : il faut baisser fortement et rapidement nos émissions de gaz à effet de serre pour limiter les effets du changement climatique. Mais les sciences du climat ont progressé depuis les dernières évaluations du GIEC et offrent une plus grande assurance dans la compréhension de notre système climatique et de son évolution, et notamment sur les questions du cycle de l’eau. Pascale Braconnot, chercheuse au Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement (LSCE-IPSL), a participé au dernier rapport du GIEC sur le chapitre dédié au cycle de l’eau.

Comme pour de nombreux aspects de notre système climatique, l’étude du cycle de l’eau et de son évolution se déroule sur plusieurs tableaux. Une élévation de la température des océans implique une évaporation plus forte, d’autant plus qu’une atmosphère plus chaude peut contenir plus de vapeur d’eau. Ces aspects conditionnent aussi la formation des nuages puis les retombées en pluies sur les surfaces continentales et sur l’océan. Des incertitudes sont toujours présentes sur certains points, notamment au regard des nuages, mais ces incertitudes ont été réduites par deux depuis le dernier rapport du GIEC en 2014.

Dans l’ensemble, une augmentation des températures globales va intensifier le cycle de l’eau, avec des précipitations globalement plus importantes mais surtout plus variables et un effet différent selon les régions. Le rapport indique qu’il est très probable de voir une augmentation des pluies aux hautes latitudes, sur le pacifique équatorial et les régions des moussons, mais une baisse sur les parties subtropicales et des zones des tropiques. Il précise également que les précipitations intenses ont augmentées depuis les années 1950 et qu’elles continueront à s’intensifier à un taux d’environ 7% par degré de réchauffement, avec une distribution géographique différente de celle des précipitation moyennes.

De cela découle des risques d’inondations ou de périodes de sécheresse plus importants causés par des pluies plus disparates. Ces évènements sont déjà visibles aujourd’hui. Les sécheresse agricoles et écologiques ont augmenté dans de nombreuses régions et se renforceront pour chaque nouvel incrément du réchauffement. Cela dit, la fréquence et le lieu de ces évènements sera dépendant des projections des changements de la circulation atmosphérique régionale, par exemple les moussons et les orages dans les moyennes latitudes.

« Continued global warming is projected to further intensify the global water cycle, including its variability, global monsoon precipitation and the severity of wet and dry events » – IPCC Summary for Policy Makers

Le cycle de l’eau est aussi concerné par l’eau à l’état solide : les neiges, glaciers et calottes polaires. Cette évaluation met en avant une fonte des neiges plus précoce, avancée plus tôt dans le printemps au détriment de l’été. Cela a alors des implications sur les réserves d’eau relâchées pendant l’été qui sont stockées sous forme de neige. Le réchauffement global a également un impact sur l’évaporation de l’eau, qui va s’intensifier à la fois à la surface de l’océan et sur les surfaces continentales. Et une demande évaporative plus conséquente sur les sols augmentera la sévérité des périodes de sécheresse.

Ce rapport du GIEC présente un travail remarquable sur l’aspect régional. Bien que plus de régions seront sujettes à des risques de sécheresses plus courants et plus fréquents, le rapport met en avant une visualisation des risques et impacts propres à chacune d’entre-elles. L’évaluation fait d’ailleurs ressortir pour la méditerranée, le sud-ouest de l’Amérique du sud et l’ouest de l’Amérique du nord une aridification qui dépasse largement ce que ces régions ont pu connaître sur le dernier millénaire. Mais bien que des changements soient déjà enclenchés par le CO2 relâché actuellement dans l’atmosphère, l’amplitude de ces changements dépendra de nos émissions futures.

Les activités humaines, au-delà des émissions de gaz à effet de serre, ont aussi un impact sur le climat. L’utilisation des sols et l’irrigation notamment influencent le cycle de l’eau à l’échelle locale, mais aussi l’urbanisation. Le rapport discute avec une confiance moyenne d’un impact sur les précipitations locales, mais plus assurément d’un ruissèlement plus intense. Les eaux souterraines ont aussi leur place : le rapport montre une forte confiance sur le fait que les réserves des nappes phréatiques s’épuisent depuis le début du XXIe siècle, conséquence des pompages d’eau pour l’irrigation des terres agricoles et arides.

 

Pour en savoir plus :

Comprendre pourquoi les nuages sont une énigme pour le cycle de l’eau atmosphérique avec Hélène Brogniez

Savoir ce qui se passe dans les réserves souterraines avec Agnès Ducharne : 20 000 flots sous la Terre

Pascale Braconnot


LSCE-IPSL