Éduquer sans angoisser, la difficulté d’enseigner le changement climatique


Alors que les conséquences du changement climatique se font déjà sentir, l’enseignement du phénomène a pris un retard conséquent dans le monde. Générateur d’anxiété chez les élèves, comment évoquer le futur de la planète sans les décourager ?

Selon un rapport de l’UNESCO sorti en 2021, seuls 53 % des programmes scolaires dans le monde mentionnent le changement climatique et, lorsque c’est le cas, son traitement est mineur. « En France, il n’apparaît vraiment dans les programmes que depuis 2 ans », annonce David Wilgenbus, astrophysicien de formation, anciennement responsable des projets pédagogiques de l’association La main à la pâte. C’est face à ce constat qu’il décide de créer en 2018 l’Office for Climate Education (OCE) avec des partenaires académiques et associatifs : « Il n’existait alors pas de structure accompagnant les professeurs de primaire et collège spécifiquement sur cette thématique à l’international via des outils pédagogiques gratuits, multimédias, multilingues et au plus près des connaissances scientifiques », relate-t-il.

Au travers de ses formations destinées aux enseignants, l’actuel directeur de l’OCE constatait pourtant une forte demande sur le sujet : « Beaucoup ne se sentent pas outillés », affirme-t-il, « et même pour ceux ayant des connaissances en climatologie, l’approche qu’ils en ont reste très disciplinaire, or la thématique du changement climatique a besoin d’être pluridisciplinaire. » Au-delà des connaissances purement scientifiques que nécessite cet enseignement, son retard à l’échelle mondiale montre qu’il ne s’agit pas d’un thème comme les autres. « Depuis deux ans, une demande nous revient très fortement : comment faire pour enseigner cette thématique sans générer de l’angoisse chez les élèves ? », expose David Wilgenbus.

Les sciences au cœur de l’apprentissage

De fait, les enseignants se trouvent dans une posture délicate : il s’agit d’expliquer la gravité du phénomène tout en montrant que l’avenir n’est pas écrit. « La pédagogie basée sur les projets est une bonne solution », affirme David. « Elle permet une approche pluridisciplinaire et place les enfants dans une situation où ils sont acteurs, où ils mettent en place des solutions. » Tout en évitant la vision catastrophiste, l’action canalise une partie de l’angoisse des élèves. Malgré tout, pour David, « On ne peut pas complètement éviter ce sentiment, car le changement climatique a bel et bien des conséquences négatives, il faut donc accueillir cette anxiété et permettre aux enfants de se sentir partie prenante des actions. »

Par cette approche, l’enseignement scientifique donne une large place à l’expérimentation et au débat, propice au développement de l’esprit critique des élèves : « Il faut non seulement qu’ils comprennent ce qu’il se passe, mais aussi comment la communauté scientifique travaille pour différencier un énoncé scientifique d’une opinion personnelle », déclare le directeur de l’OCE. Alors que le changement climatique impacte des domaines aussi variés que les transports, l’environnement ou la santé, ces formes de pédagogie ouvrent la voie vers un enseignement des sciences moins isolé des questions sociétales. « Pour donner le goût des sciences, il faut que les enfants comprennent quel rôle elles jouent dans la société »,
conclut David. « Personnellement, je vois l’éducation au changement climatique comme une opportunité pour l’enseignement des sciences, parce qu’elles se retrouvent incarnées dans des problématiques que tout le monde peut s’approprier. »

Par Marion Barbé pour l’IPSL

 

Pour en savoir plus

Voir le débat Climat : comprendre, s’éduquer, agir. L’éducation au climat à tous les âges de la vie.

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