Campagne Amaryllis-Amagas : dernière semaine en mer, partie 1


Déjà la dernière semaine de la campagne Amaryllis-Amagas ! Retour sur la fin de la campagne.

• 24 juin 2023 : Le bateau continue son parcours et les stations de prélèvements se succèdent. La station 12 a tenu toutes ses promesses : le sédiment récupéré est plus clair avec des alternances de couleurs. Grâce à une carotte de 32 mètres, les scientifiques pourraient remonter dans le passé jusqu’à plus d’un million d’années et reconstruire l’histoire climatique passée du Sahara, qui a contribué à nourrir la forêt amazonienne, par des apports de poussières.

 

Pour la station 13, en revanche, c’est la déception ! La carotte Casq remontée était pleine d’eau et de la boue. Seule la partie la plus basse de l’échantillon, présentant des foraminifères (micros fossiles avec une coquille calcaire) est restée. La journée s’est encore compliquée avec la mise à l’eau de la CTD : à cause du courant, les échantillons n’ont pu être prélevés.

Dans la nuit, le Marion Dufresne a franchi la ligne imaginaire de l’équateur et se trouve maintenant dans l’hémisphère sud, en plein hiver austral.

 

• 25 juin 2023 : Toute la nuit, les écrans d’acquisition du PC scientifique ont montré un relief marin accidenté avec des canyons, failles et accidents de terrain. À la station 14, les prélèvements sont un peu spéciaux : les carottiers embarquent dans leurs plongées des gobelets de polystyrène destinés à mettre en évidence l’impact de la pression hydrostatique. Les enfants de deux écoles qui suivent la campagne ont préalablement décoré ces gobelets. Partis au fond de l’océan, ils reviennent compressés et comme “miniaturisés” tout en conservant à l’échelle leurs dessins et signatures.

 

• 26 juin : Les prélèvements faits à la station 14 sont très satisfaisants : tout d’abord, une carotte Casq de 10.5 mètres avec des belles alternances de couleurs. Rien qu’à l’œil nu les paléoclimatologues repèrent déjà la succession des changements climatiques. Sur quelques mètres, du sédiment clair qui renvoie à la période chaude actuelle (les derniers 10 000 ans), puis une période plus sombre correspondant à une période plus froide, ensuite une autre couche plus claire de 50 centimètres correspondant à nouvelle phase de réchauffement assez courte, à nouveau une plus froide et ainsi de suite. Une autre carotte de 41,88 mètres a été récupérée, permettant de remonter jusqu’à 155 000 ans en arrière, couvrant cette dernière période interglaciaire, ayant un climat un peu plus chaud qu’actuellement. C’est une première dans cette région nord-est brésilienne.

Proposition artistique de succession de tronçons de carottes par Maxime Leblanc

 

• 28 juin : Dernière station en vue, la numéro 16. Elle se trouve plus au sud et est plus éloignée du fleuve Amazone et de la côte. Le fond océanique révèle une succession de monts sous-marins surélevés de 300 à 600 mètres. Intérêt scientifique de ce site : il doit contenir peu d’apports du fleuve et potentiellement des poussières en provenance du Sahara. Les chefs de mission avaient sélectionné deux monts qui paraissaient plus consistants en termes de sédiment. Le premier a fait l’objet d’une longue reconnaissance avec les sondeurs. Le premier site aurait pu se révéler propice, mais l’endroit repéré était juste en dehors de la zone autorisée par le gouvernement brésilien.

Pendant la nuit, la navigation a repris pour atteindre le deuxième mont.

Là, nous avons trouvé deux endroits intéressants. On a commencé avec le carottier Casq et récupéré 8 m 65 de sédiment très blanc, contenant beaucoup de foraminifères, donc beaucoup de matériaux en provenance de la colonne d’eau. Très différent de tout ce que nous avons vu jusqu’à présent.

détaille Charlotte Skonieczny particulièrement intéressée par ce site.

L’opération se répète sur le deuxième endroit avec cette fois un Casq de 12 mètres et un sédiment un peu plus argileux. Il a alors fallu choisir, car les scientifiques n’ont l’autorisation de lancer qu’une seule carotte Calypso, beaucoup plus longue. C’est la deuxième possibilité qui a finalement été choisie, le sédiment, étant plus cohésif, semblait offrir de meilleures perspectives de travail.

On se disait juste que c’était l’endroit où nous avions le plus de chance. Et finalement nous récupérons beaucoup de matériel avec de belles alternances de couleurs, c’est très positif.

précise la chercheuse. Et à la clé, peut-être la possibilité de remonter loin dans le passé, peut-être même jusqu’à 1 million d’années.

Découverte des sédiments contenus dans les deux Casqs prélevés sur le mont sous-marin sélectionné

Pour en savoir plus

Site internet de la campagne

Patrick Chompré


Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE - IPSL) & Laboratoire GEOPS-IPSL