Murs végétalisés, coulées vertes, jardins partagés… Les grandes villes multiplient les initiatives pour végétaliser les espaces publics. Dans nos rues, les arbres endossent de nombreuses fonctions : ils filtrent les particules, servent de surface de dépôt à certains polluants, sont sources de rafraîchissement, réduisent le bruit… Globalement, ils sont une source indéniable de bien-être.
Des arbres dans une jungle de béton
Pour autant, la végétation doit s’intégrer dans un milieu urbain qui limite ses ressources en eau et en place. Les arbres sont soumis au changement climatique, à des canicules, ou encore à des agressions physiques. Ces perturbations créent un stress hydrique et modifient la quantité d’émissions de COVb (composés organiques volatiles biochimiques) qu’ils rejettent. Comprendre et quantifier ces émissions est au cœur du projet STREET, pour mieux envisager l’intégration des arbres en ville.
L’équipe de Valérie Gros, spécialisée en chimie atmosphérique (LSCE-IPSL), cherche à documenter et quantifier ces émissions lorsque les arbres reçoivent moins d’eau, pour évaluer la contribution des COVb à la formation de pollution secondaire une fois transformés dans l’atmosphère. Depuis 4 ans à travers le projet STREET, les chercheurs mènent des campagnes de mesure des émissions de COVb par les platanes en ville.
« Nous analysons les interactions entre les émissions de la végétation et celles de l’activité humaine, et leurs conséquences sur la qualité de l’air », précise la spécialiste. La pollution en ville est en effet un mélange entre des sources biogéniques (la végétation) et anthropique (l’homme). « Une partie des platanes "témoins” va recevoir l’eau comme dans un cycle naturel. Sur l’autre moitié, on va restreindre l’arrivée en eau pour simuler un stress hydrique. Puis à l’aide du spectromètre de masse, on va mesurer les émissions des platanes pour les comparer » explique la chercheuse.
L’expérimentation prend également en compte une phase de modélisation, qui permettra d’intégrer les effets du stress hydrique en ville dans les modèles de fonctionnement de l’arbre urbain. Karine Sartelet, spécialisée en modélisation atmosphérique (CEREA-IPSL), intervient dans cette partie du projet. Elle cherche à représenter les différents processus qui expliquent la formation des particules, qu’elles soient émises par le trafic ou par la végétation. « La concentration en particules diffère d’une rue à l’autre », commente-t-elle. En modélisant les réseaux de rues, Karine Sartelet obtient de précieuses informations sur les niveaux de concentration et leurs sources potentielles. « On observe par exemple plus de particules dans une rue que sur un toit. Cela nous donne des clés pour comprendre si les arbres jouent un rôle dans cette concentration, qu’il soit positif ou négatif ».
Les équipes du projet STREET ont encore 4 ans pour documenter les émissions de COVb des platanes. Demain, ces analyses seront une source d’indications pour savoir où, comment, et avec quelles espèces planter les arbres en ville, pour améliorer la qualité de l’air, et donc la santé des hommes.