De l’importance de l’éducation aux sciences du climat


Lancé par la Fondation La main à la pâte et la communauté en sciences du climat, l’Office for Climate Education (OCE) promeut l’éducation au changement climatique dans le monde. Dans une interview accordée à Sorbonne Université, Éric Guilyardi en présente les objectifs et les enjeux de cette organisation placée sous l’égide de l’Unesco.

Quelles sont les principales missions de l’OCE ?

Éric Guilyardi. L’OCE a été créé en 2018 en réponse à l’article 12 de l’Accord de Paris soulignant l’importance de l’éducation aux sciences du climat. Son objectif est de doter les générations présentes et futures d’outils à même de les préparer à vivre dans un monde en transformation et de les protéger des a priori et des idéologies. Pour mener à bien cet objectif, la première mission de l’OCE consiste à créer des ressources pédagogiques de qualité à destination des enseignants, qui sont souvent démunis sur ce sujet. Plus de 70 supports multilingues disponibles gratuitement ont été conçus à ce jour (guides pédagogiques, résumés des rapports du GIEC, animations multimédia, protocoles de formation des enseignants, MOOC). Toutes ces ressources sont non seulement traduites, mais aussi adaptées, avec des partenaires locaux, aux contextes pédagogiques et sociogéographiques de différents pays.

La seconde mission de l’OCE est de proposer, aux enseignants et aux formateurs, une offre de développement professionnel, pour les familiariser avec les sciences du climat, les pédagogies actives et le montage de projets qui permettent aux élèves de passer à l’action à leur échelle. Aujourd’hui, nous avons déjà touché plus de 80 000 enseignants et, à travers eux, près d’un million d’élèves.

La dernière mission qui nous incombe concerne l’appui aux politiques publiques. Dans ce cadre, nous accompagnons les systèmes éducatifs du monde entier pour les aider à créer des environnements favorables à la mise en œuvre d’une éducation au changement climatique de qualité. Nous avons, par exemple, accompagné la refonte des programmes du lycée en France.

Quel rapport entretenez-vous avec le GIEC ?

E. G. L’OCE est en contact permanent avec des climatologues et des chercheurs qui contribuent aux rapports du GIEC. L’OCE a, par ailleurs, été invité par le ministère français de la Transition écologique à contribuer à l’examen gouvernemental des projets de ces rapports sur les questions d’éducation, et est devenu, en 2021, une organisation observatrice du GIEC.

Quels liens vous unissent à Sorbonne Université ?

E. G. Sorbonne université est l’un des membres fondateurs de l’OCE, aux côtés de La main à la pâte, l’Institut de recherche pour le développement (IRD), de Météo-France et de l’association Météo & Climat. Elle héberge désormais l’équipe opérationnelle de l’OCE, ce qui constitue un gage de crédibilité pour nos partenaires.

Par ailleurs, nombre de chercheurs du climat impliqués dans l’OCE en France travaillent à l’Institut Pierre-Simon Laplace, engagé dès l’origine dans l’OCE, et dont Sorbonne Université est l’une des tutelles. Nous avons également tissé des liens forts avec la Maison pour la science de Paris qui propose, à Sorbonne Université, une offre pour le développement professionnel en sciences des enseignants du primaire et du secondaire. Nous travaillons aussi avec l’Institut de la transition environnementale dont le directeur est le représentant de l’université dans le conseil stratégique de l’OCE.

À l’avenir, nous allons proposer d’autres actions avec la Fondation Sorbonne Université et ses partenaires. Nous espérons aussi profiter de la pluridisciplinarité de Sorbonne Université pour développer des approches plus globales du changement climatique, notamment en lien avec les sciences humaines et sociales.

Avec quels pays travaillez-vous ?

E. G. Nous travaillons avec plus de 70 partenaires institutionnels, scientifiques, éducatifs et financiers dans plus de 30 pays. 60% de notre activité concerne des pays en voie de développement (en particulier l’Amérique latine, l’Afrique et l’Asie du Sud-Est), 20% concerne les pays européens et 20% la France.

Un premier projet pilote de cinq ans a vu le jour en Amérique latine pour adapter les ressources de l’OCE et former plus de 15 000 enseignants, en lien avec des acteurs locaux.

Vous œuvrez main dans la main avec des pédagogues. En quoi est-ce essentiel ?

E. G. Afin de promouvoir l’égalité des chances pour tous, garçons et filles, en matière d’éducation au changement climatique, l’OCE cible l’éducation des enfants de 9 à 15 ans. Il s’appuie, pour cela, sur deux piliers : l’expertise de la pédagogie et les sciences du climat. Cette co-construction avec des professionnels de l’éducation est indispensable pour concevoir des ressources à la fois fondées sur la recherche scientifique, et compréhensibles par les enseignants et les enfants. En tant que climatologues, nous avons une expertise de l’enseignement supérieur, mais la pédagogie des petites classes est très différente. Les enseignants de primaire n’ont, quant à eux, pas toujours la formation scientifique suffisante pour aborder ces questions.

Le conseil scientifique et pédagogique de l’OCE est donc constitué à la fois de scientifiques et de pédagogues. Il bénéficie de l’expertise développée depuis des années par la Fondation La main à la pâte en matière d’enseignement des sciences à l’école et d’un réseau international riche.

Quelles sont les perspectives de l’OCE pour les cinq ans à venir ?

E. G. Continuer à développer et diffuser à grande échelle de nouvelles ressources en lien avec les prochains rapports du GIEC. Nous souhaitons également mettre l’accent sur une approche interdisciplinaire des enjeux climatiques (économiques, sociaux, philosophiques, etc.). Nous allons notamment travailler sur la question de la justice climatique et de l’équité entre les genres, sur l’éco-anxiété de plus en plus présente dans les écoles, et sur le développement de l’esprit critique. Nous voulons aussi faciliter la mise en place de communautés de pratique pour les enseignants en les aidant à travailler en réseau.

Notre deuxième objectif est de continuer à soutenir les politiques publiques, à travers un certain nombre de missions auxquelles nous associe l’Unesco. Nous allons également déployer de nouveaux projets pilotes dans les pays en développement, notamment en Afrique.

Source : Sorbonne Université, « Soutenir l’éducation au changement climatique ».

Eric Guilyardi (LOCEAN-IPSL), David Wilgenbus (OCE)


Office For Climate Education