30 ANS DE RECHERCHE SUR LE CLIMAT À L’IPSL
Vendredi 12 décembre 2025
Collège de France, Paris 5e
La journée du 12 décembre 2025 réunit chercheuses, chercheurs et partenaires autour des grands enjeux actuels des sciences du climat. Les interventions présentent les avancées récentes tout en posant une question centrale : comment faire en sorte que les connaissances scientifiques alimentent réellement les choix publics ? Les séquences abordent les événements extrêmes, les vulnérabilités urbaines, les enjeux liés à l’eau, à l’agriculture et à la santé, et interrogent notre capacité collective à mieux anticiper les impacts. Plusieurs discussions questionnent aussi la manière de rendre les modèles plus utiles, plus précis et plus accessibles. La problématique de la désinformation traverse les échanges : comment maintenir la confiance dans un contexte où les faits scientifiques sont contestés ou détournés ?
La journée fait ressortir la diversité des approches, la clarté des chantiers encore ouverts et la nécessité d’un dialogue continu entre recherche, décision publique et société.
LES RÉSUMÉS
Valérie Masson-Delmotte (LSCE) • Laurence Tubiana (European Climate Foundation) • Robert Vautard (LSCE) • Paul Watkinson (Ministère de la transition écologique et solidaire)
Si la décennie écoulée a consolidé la connaissance des risques, affiné les trajectoires compatibles avec 1,5 °C et éclairé les impacts régionaux, le fossé entre diagnostics scientifiques et décisions politiques reste profond. Les travaux du GIEC ont pourtant structuré l’Accord de Paris : définition du niveau d’action nécessaire, émergence du concept de neutralité carbone, reconnaissance du besoin d’un rapport spécial sur 1,5 °C…
Comment ces repères scientifiques se traduisent-ils dans les négociations, alors que certains États freinent, contestent ou filtrent leur intégration ? Comment préserver la place de la science dans un contexte marqué par les tensions Nord-Sud, les enjeux de représentativité, la méfiance et la désinformation ?
Cette séquence croise les regards de Valérie Masson-Delmotte, Paul Watkinson, Laurence Tubiana et Robert Vautard pour interroger la manière dont la science du climat peut continuer à éclairer l’action mondiale.
Davide Faranda (LSCE) • Aglaé Jézéquel (LMD) • Pascal Yiou (LSCE)
L'étude des événements extrêmes fait partie de l'histoire de l'IPSL, qui a accompagné les recherches sur la compréhension des mécanismes physiques qui les gouvernent, et leurs caractéristiques statistiques. Il est d'autant plus important de pouvoir décortiquer les événements extrêmes qu'ils rendent nos sociétés météo-sensibles, par leurs impacts. Il est alors essentiel de comprendre comment ils sont et pourront être affectés par un climat qui change. Nous vous présenterons quelques clés d'une partie de la recherche effectuée hier et aujourd'hui, à l'IPSL et dans le monde. Au programme : un aperçu des concepts et des méthodes pour étudier les événements extrêmes, un focus sur l'attribution d'événements extrêmes (une branche récente des sciences du climat souvent au cœur de l'actualité), et une ouverture sur les liens entre aléas et impacts, et sur les recherches interdisciplinaires qui s'y tissent.
Sophie Bastin (LATMOS) • Jean-Marie Mouchel (METIS) • Karine Sartelet (CEREA) • Vincent Viguié (CIRED)
Canicules, inondations, pollution, manque d’eau : les villes sont en première ligne face au changement climatique. Comment les adapter pour qu’elles restent vivables ? À l’IPSL, les chercheurs unissent leurs forces pour mieux comprendre le lien entre climat et urbanisme. Grâce à de nouveaux modèles, ils étudient comment la chaleur circule entre les bâtiments, comment la végétation rafraîchit les quartiers ou comment la pollution évolue selon la météo. Ces travaux aident déjà certaines villes à repenser leurs plans d’aménagement, leurs espaces verts ou leur gestion de l’eau.
Avec Sophie Bastin, Karine Sartelet, Jean-Marie Mouchel et Vincent Viguié, cette session explorera une nouvelle facette des sciences du climat : celle qui s’ancre dans la ville pour imaginer des territoires plus frais, plus sains et plus résilients.
Antoine Bierjon (IPSL) • Stéphanie Boniface (IPSL) • Éric Guilyardi (LOCEAN) • Céline Serrano (Inria & Labos 1point5)
Comment rendre la recherche scientifique compatible avec la transition écologique ? À l’IPSL, cet engagement devient concret : les laboratoires mesurent leur empreinte carbone, repensent leurs pratiques et expérimentent de nouvelles formes de gouvernance. Derrière cette transformation, des collectifs comme ClimAction ou Labo 1.5 montrent qu’il est possible de concilier excellence et sobriété, science et cohérence. Réduction des vols courts, achats responsables, calcul raisonné, décisions votées collectivement : la recherche s’applique enfin à elle-même les principes qu’elle défend.
Avec Éric Guilyardi, Stéphanie Boniface, Antoine Bierjon et Céline Serrano, cette session mettra en lumière une communauté scientifique en mutation, qui interroge ses méthodes, ses valeurs et son rôle exemplaire dans la transition environnementale, tout en questionnant la place de la parole scientifique dans le débat public.
Philippe Drobinski (LMD) • Marine de Guglielmo-Weber • (Inserm) • Céline Guivarch (CIRED) • Kévin Jean (Département de Biologie de l’ENS)
Sobriété, innovation technologique, géoingénierie : les voies pour atténuer le changement climatique se multiplient, parfois jusqu’à la confusion. Entre transformation des modes de vie et promesse de solutions techniques, comment distinguer les leviers réellement efficaces, et leurs effets secondaires ? Certaines politiques sobres améliorent immédiatement la santé publique et la qualité de vie, quand d’autres, plus technologiques, déplacent les impacts sans les résoudre. Agir sur les causes ou sur les symptômes : le choix engage notre avenir collectif.
À l’heure où l’urgence impose lucidité et cohérence, Céline Guivarch, Philippe Drobinski, Marine de Guglielmo Weber et Kévin Jean confronteront leurs approches pour éclairer les complémentarités possibles entre sobriété et innovation, et questionner les limites d’une planète que la science peut comprendre, mais ne saurait réparer seule.
Samuel Morin (CNRM & TRACCS) • Sébastien Barot (IEES Paris)
Sébastien Barot présentera le GREC francilien, ses objectifs, son fonctionnement, ses outils, et les liens existant entre l'IPSL et le GREC. Il montrera en particulier en quoi le GREC est un outil important à l'interface entre la recherche et la décision publique.
Samuel Morin présentera le programme national de recherche TRACCS (Transformer la modélisation du climat pour les services climatiques, co-piloté par le CNRS et Météo-France), rassemblant les communautés nationales en modélisation du climat et la mobilisation de ces outils pour anticiper les impacts et risques climatiques pour l'aide à la décision, et qui fait appel à de nombreux acteurs scientifiques et techniques de l'IPSL.
Gonéri Le Cozannet (BRGM)
À mesure que le climat se réchauffe, les effets de l'intensification et la multiplication des canicules, des sécheresses et des inondations deviennent de plus en plus évidents. Les réponses pour contenir l'augmentation des risques climatiques sont disponibles et ont de nombreux bénéfices, notamment pour la santé, mais engager une adaptation à la hauteur des enjeux nécessitera un débat lucide, transparent et démocratique, ainsi qu'un pilotage et des financements renforcés.
Carole Dalin (Équipe « Surface et Réservoir ») • Florence Habets (ENS) • Gonéri Le Cozannet (BRGM) • Antoine Séjourné (GEOPS)
Sécheresses, dégel du permafrost, tensions agricoles et sanitaires : les effets du changement climatique s’intensifient et redessinent nos équilibres vitaux. L’eau devient le fil conducteur de cette crise, révélant nos vulnérabilités et nos contradictions. Comment adapter nos usages sans compromettre la biodiversité ? Comment anticiper sans se réfugier dans le curatif ? Entre lucidité scientifique et inertie collective, le fossé se creuse. À l’heure où chaque degré compte, chercheurs et chercheuses interrogent notre capacité d’action et de coopération.
Avec Gonéri Le Cozannet, Florence Habets, Carole Dalin et Antoine Séjourné, cette session mettra en perspective les risques climatiques liés à l’eau, à l’agriculture et à la santé, pour éclairer les interdépendances entre milieux naturels et sociétés humaines et rappeler que comprendre ne suffit plus : il faut apprendre à agir ensemble.
Christophe Cassou (LMD) • David Chavalarias (Institut des systèmes complexes de Paris Île-de-France) • Audrey Garric (Journal Le Monde) • Thomas Wagner (Bon Pote)
La désinformation climatique n’est plus marginale : c’est un véritable écosystème, où se mêlent intérêts économiques, politiques, complotistes et géopolitiques. Ce brouillard informationnel fragilise la parole scientifique et divise même le camp du « pro-climat » entre partisans de la sobriété et tenants de l’innovation technologique. Comment informer sans polariser ? Comment vulgariser sans trahir la complexité ? À l’heure où les réseaux sociaux amplifient les discours extrêmes, chercheurs, journalistes et vulgarisateurs interrogent leur rôle dans le débat public.
Pour clore les 30 ans de l’IPSL, David Chavalarias, Christophe Cassou, Audrey Garric et Thomas Wagner partageront leurs regards croisés sur les ressorts de la désinformation et la nécessité de reconstruire des espaces fiables où la science puisse à nouveau être entendue.
