30 ANS DE RECHERCHE SUR LE CLIMAT À L’IPSL
Jeudi 11 décembre 2025
Maison de l'Océan - Institut océanographique, Paris 5e
Il y a trente ans, les premiers modèles climatiques intégraient les interactions entre océan, atmosphère et biosphère, le GIEC publiait son second rapport, et l’idée que les activités humaines influencent le climat de la Terre commençait à s’imposer. C’est dans ce contexte que l’Institut Pierre-Simon Laplace (IPSL) a été fondé, avec une ambition claire : rassembler les sciences du climat autour d’objectifs communs. Depuis, le domaine a connu une révolution avec des observations toujours plus précises, des modèles de climat de plus en plus sophistiqués, tandis que les infrastructures informatiques et les collaborations internationales offrent une compréhension inégalée du climat, passé comme futur.
La journée du 11 décembre 2025 porte un regard rétrospectif sur les réalisations de l’IPSL depuis sa fondation tout en discutant des enjeux actuels des sciences du climat, en termes de modélisation, observation, calcul et formation des étudiants. L’évolution des recherches dans des thématiques scientifiques emblématiques transverses de l’IPSL est présentée. L’objectif est de mettre à l’honneur celles et ceux qui, au quotidien, incarnent la mission de notre institut : produire une recherche exigeante et indépendante, au service des défis scientifiques et sociétaux de notre temps.
LES RÉSUMÉS
Matthias Cléry (Comité pour l'histoire du CNRS) • Sophie Godin-Beekmann (IPSL) • Jean Jouzel (IPSL) • Hervé Le Treut (IPSL) • Robert Vautard (IPSL et GIEC)
Retour sur la genèse de l’IPSL et les grandes dynamiques scientifiques qui ont conduit à sa création dans les années 1990, avec un éclairage historique sur l’évolution des recherches en atmosphère, océan, chimie atmosphérique et climat. Les anciens directeurs reviendront sur les étapes fondatrices : intuition de Gérard Mégie, émergence du modèle « système Terre », montée en puissance des contributions au GIEC et structuration progressive d’une communauté unifiée. La table ronde explorera également la transformation de l’IPSL face aux événements extérieurs (COP21, vagues de chaleur, mobilisation citoyenne) et l’intégration croissante des enjeux science-société. Elle abordera enfin les développements récents : Graduate School, centre Climat-Société, nouvelles technologies de modélisation et arrivée de l’IA. Les intervenants traceront la trajectoire future de l’Institut et partageront un message aux jeunes chercheuses et chercheurs qui rejoignent aujourd’hui l’aventure climatique.
Susan Solomon (MIT, USA, co-chair du WGI AR4)
In this talk, I will briefly summarize the remarkable history of stratospheric ozone depletion science and policy. I will summarize the elements that led to success in the Montreal Protocol, and how science combined with other factors to make this agreement the world’s most successful to date. I will highlight how climate science and its policies evolved in parallel, and I will discuss key linkages between climate change and ozone depletion. Throughout the talk, I will show examples of particular scientific efforts including a range of research groups worldwide that combined to produce key information for the public and policymakers. Finally, I will discuss how the two issues continue to evolve and intertwine, and provide an outlook of their futures.
Pascale Braconnot (LSCE) • Julie Deshayes (LOCEAN) • Marie-Alice Foujols (IPSL)
Que retenir de ces 30 années de développement du modèle de climat de l'IPSL mêlant progrès scientifiques et techniques, aventure humaine et technologique, en France et à l'International ? Issue des tous premiers travaux fédératifs de l'Institut, la première génération du modèle couplé global océan/atmosphère de l'IPSL a été publiée en 1997. En 2025, la 7e génération du modèle climat de l'IPSL est au cœur des travaux de modélisation du climat à l'IPSL.
Petit à petit le modèle en « y a qu'à » s'est transformé en réalité, les uns et les autres ont ramé dans la même direction et quelques simulations emblématiques ont projeté ICMC parmi les grands groupes de modélisation internationaux. L'histoire du modèle ne peut être détachée de l'aventure IPSL, de la création d'un langage commun, de choix collectifs, de l'évolution des calculateurs, de la soif de comprendre comment tous les éléments interagissent, de la reconnaissance du rôle de l'activité humaine dans les bouleversements climatiques en cours et la façon de maintenir des trajectoires futures permettant de respecter l'accord de Paris et les objectifs du développement durable. L'exposé retracera quelques étapes de cette épopée, en cherchant à dégager les ingrédients fédérateurs.
Sophie Cloché (IPSL) • Valérie Gros (LSCE) • Martial Haeffelin (IPSL) • Benoit Laurent (LISA) • Gilles Reverdin (LOCEAN) • Vincent Thieu (METIS)
Les capacités d’observation du système Terre et de tous ses compartiments se sont fortement développées au cours des trente dernières années permettant des avancées importantes de nos connaissances des nombreux processus en jeu, mais également de meilleures quantifications des variabilités naturelles et des tendances sur le long terme. Le centre d’observation de l’IPSL vous propose de parcourir 30 ans d’observation en sciences du climat et de l’environnement via 5 récits complémentaires pour illustrer :
- le développement des services concernant les données d’observation via les grandes campagnes et chantiers nationaux,
- la complémentarité des données satellitaires et in situ illustrée en océanographie,
- la structuration des observations des surfaces continentales depuis les services nationaux jusqu’aux infrastructures de recherche,
- l’évolution à travers le temps des recherches sur la qualité de l’air et des moyens d’observation mobilisés,
- la trajectoire de l’observatoire SIRTA sur ces trois décennies en soutien à la recherche et à l’enseignement et le rôle structurant de l’IPSL, portant ou accompagnant ces évolutions.
Sophie Cloché (IPSL) • Guillaume Levavasseur (IPSL) • Karim Ramage (IPSL)
Le centre de calcul et données de l'IPSL, ESPRI, s'est construit depuis plus de 25 ans en plusieurs étapes, issu de plusieurs initiatives et équipes, au service des grands projets de recherche de l'IPSL, de ses laboratoires et de ses partenaires. Il est devenu aujourd'hui un centre de référence certifié et labellisé, appliquant l'état de l'art pour la gestion du cycle de vie des données climatiques.
Philippe Bousquet (LSCE) • Damien Cardinal (LOCEAN) • Laurence Picon (LMD) • Solène Turquety (LATMOS)
Cette table ronde retrace quinze ans d’évolution des formations en sciences du climat dans le périmètre de l’IPSL, depuis l’impulsion donnée par les écoles doctorales et les premiers DEA jusqu’aux projets structurants LabEx puis EUR. Les intervenants reviendront sur la façon dont ces dispositifs ont permis de rapprocher recherche et enseignement, de financer des stages de terrain, des modules innovants et des ressources numériques mutualisées. Ils éclaireront la construction progressive d’une identité étudiante IPSL et l’ouverture croissante à de nouvelles disciplines : biogéochimie, observation spatiale, écologie, sciences de l’environnement. La discussion portera également sur les innovations pédagogiques (cours hybrides, modules en ligne, ateliers pratiques), les compétences clés pour les cinq prochaines années (IA, données, modélisation) et les enjeux de visibilité internationale. Enfin, les intervenants aborderont la question centrale de la pérennité des financements et de la capacité à maintenir une cohérence de formation inter-établissements au-delà du LabEx et de l’EUR.
Nicolas Pige (GEOPS) • Pierre Sepulchre (LSCE)
Née il y a près de deux siècles de l’observation géologique et paléontologique, l’étude des climats et des environnements passés a évolué de concert avec les autres champs disciplinaires des géosciences. Trois séries d’avancées majeures en ont résulté. D’abord, la diversité croissante des archives paléoclimatiques et paléo-environnementales a permis de bâtir des théories quant aux mécanismes de régulation du système Terre, dont les équilibres se jouent à des échelles de temps multiples. Ensuite, le passé, historique comme géologique, est devenu un banc d’essai et de validation de modèles de climat dont l’éventail de complexité n’a cessé de s’élargir. Enfin, la paléoclimatologie a mis en lumière le caractère inédit du changement climatique et environnemental lié à l’activité humaine, en montrant que depuis l’impact d’un astéroïde sur notre planète il y a 65 millions d’années, aucune perturbation des enveloppes fluides et des cycles biogéochimiques n’a atteint l’ampleur et la vitesse du bouleversement actuel.
Ici, il s’agit de commencer par contextualiser l’histoire de l’étude des paléoclimats et des paléoenvironnements à l’IPSL – un pan essentiel des activités de recherche de l’institut –, avant d’illustrer cette dynamique et son intégration dans le paysage scientifique national et international par un projet en cours. Celui-ci explore l’impact des variations de la productivité biologique sur le cycle du carbone au cours des derniers cycles glaciaires/interglaciaires, en mobilisant une approche multi-proxy et des comparaisons modèle-données. Nous proposerons ensuite une courte exploration des perspectives de la paléoclimatologie à l’IPSL, en soulignant notre compréhension imparfaite de changements pourtant bien documentés, en discutant comment les climats passés peuvent devenir des bancs de réglage des modèles systèmes Terre utilisés pour les projections climatiques futures, et en identifiant tant les difficultés que les opportunités qu’offrent à la fois l’évolution des techniques et la nécessaire sobriété énergétique que nous impose le changement climatique actuel.
Laurent Bopp (LMD) • Coraline Leseurre (Institut Flamand de la Mer, Ostende, Belgique)
L’océan joue un rôle essentiel dans l’évolution du CO2 atmosphérique, en absorbant chaque année près de 30 % des émissions anthropiques de carbone. Déterminer l’intensité actuelle de ce puits et anticiper son évolution au cours des prochaines décennies représente un enjeu majeur pour notre compréhension du changement climatique et de sa dynamique future.
Depuis plus de 30 ans, l’IPSL et ses laboratoires déploient une combinaison d’approches complémentaires pour relever ces défis, en mobilisant à la fois des observations in situ variées, des méthodes statistiques avancées et des modèles du cycle du carbone océanique intégrés au modèle climatique de l’IPSL.
Dans cette présentation, nous expliquerons comment ces approches ont été progressivement mises en place au sein de l’IPSL, et comment les interactions entre équipes et outils ont permis de positionner l’institut comme un acteur scientifique majeur dans l’étude du cycle du carbone océanique.
Hélène Chepfer (LMD) • Cathy Clerbaux (LATMOS) • Cyril Crevoisier (LMD) • Juan Cuesta (LISA) • Sarah Safieddine (LATMOS)
Les missions spatiales d’observation de l’atmosphère fournissent aujourd’hui une vision essentielle de sa composition et de son évolution. L’instrument IASI mesure à l’échelle globale les gaz à effet de serre, la température, l’ozone, les poussières désertiques, ainsi que l’ammoniac issu des activités agricoles, offrant des données clés pour le climat et la qualité de l’air. De son côté, la mission CALIPSO, grâce à son lidar, a observé la structure verticale des nuages et des aérosols avec une précision unique, révolutionnant notre compréhension de leurs rôles dans le système climatique. Ensemble, ces missions représentent une avancée majeure pour l’IPSL et pour la communauté scientifique mondiale dans la surveillance continue et précise de l’atmosphère.
Audrey Chatain (LATMOS) • François Forget (LMD)
Le Pôle « Système Solaire » regroupe les équipes de plusieurs laboratoires de l'IPSL (GEOPS, LATMOS, LISA, LMD, etc.) depuis son origine. L'étude des autres mondes du système solaire (et à présent autour des autres étoiles) nous permet de tester nos outils et concepts théoriques en physique et chimie du climat et des environnements. Cela est riche d'enseignements sur notre planète Terre. Pour fêter les 30 ans de l'IPSL, nous vous invitons à un voyage interplanétaire à partir du Soleil vers Pluton et jusqu'aux planètes extrasolaires. En chemin nous raconterons quelques-unes des grandes explorations et découvertes effectuées par les équipes de l'IPSL depuis plus de trente ans.
Les « Jeunes engagé·es »
représenté·es par Nicolas Bienville • Mathilde Bourreau • Elisa Richard
Notre intervention est pensée comme le discours d’introduction des 55 ans de l’IPSL en 2050. Notre format est inspiré des scénarios du GIEC et rédigé avec les techniques narratives de la « hard science-fiction » (science-fiction basée sur les travaux scientifiques actuels) appliqué aux sciences du climat. Le discours sera découpé en trois parties et précédé d’une introduction du groupe des jeunes engagé·es de l’IPSL.
Pièce chorégraphique « Nouées » par le collectif Minuit
Cette pièce est une création qui explore le monde vivant à travers sa température. Les corps des trois interprètes entrent en interaction avec des vidéos filmées en caméra thermique sur une île isolée finlandaise. Nouées nous plonge dans ce monde où ce qui est vivant est chaud, là où l’autre est un refuge curieux et réconfortant. Elle explore l’invisible : la chaleur des liens affectifs tissés entre les êtres vivants.
Les projections vidéos sont à 360° dans une salle immersive. Elles ont été filmées par Jade Verda lors d’une résidence d’un mois sur l’île d’Örö, une ancienne base militaire et espace très sauvage, située dans l’archipel finlandais. Le dispositif mobilisé est une caméra thermique, normalement utilisée pour de la photographie an imalière. À l’écran se côtoient de nombreuses espèces, des oiseaux, des écureuils, mais aussi des végétaux, des minéraux, de l’eau...
Les danseuses : Justine Sène, Jade Verda et Pauline Lida Robert
L’orchestre L’Échappée belle
Les huit violoncelles de l’Échappée belle interpréteront :
- le 1er mouvement de la 25e symphonie de Mozart (incipit du film Amadeus),
- la Pavane de Fauré,
- la Valse des fleurs de Tchaïkovski (extrait du ballet Casse-Noisette).
Ces trois morceaux seront proposés comme illustration des trois composantes du système Terre. Dans l'ordre : l'océan, l'atmosphère et les surfaces continentales.
Les interprètes : Félix Alber, Elena Bertani, Isabelle Cortot, Clara Forest, Louise Grumbach, Pierre Guilloteau, Éloïse Meyer.
L’artiste Cobie
En route vers l'avenir de le futur de demain
À l’origine du projet, une résidence de création sur le campus de Grenoble. En septembre 2022, INRAE (Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement) et l’OSU Grenoble (Observatoire des Sciences de l’Univers), la Direction de la culture et de la culture scientifique de l’UGA et le LabEx ITTEM, ont convié l’artiste Cobie (le cas échéant) à une résidence de création sur le campus de l’Université Grenoble Alpes (UGA).
L’idée était de porter la réflexion sur le discours scientifique et la difficulté de le voir dépasser les portes des labos pour atteindre le grand public, notamment sur les thèmes du changement climatique et des modifications de l’environnement.
L’artiste a donc travaillé en immersion au sein du campus sur le thème du changement climatique et de la communication faite autour des recherches scientifiques sur le sujet dans les médias généralistes et la société. Le travail de Cobie, consistant notamment à traiter des sujets graves par l’humour, le décalage et l’absurde, a permis la constitution d’une matière artistique variée allant de l’affiche sérigraphiée à la vidéo en passant par la création radiophonique ou encore la réalisation d’œuvres picturales.
Cette exposition a été présentée plusieurs fois en France sous différentes formes depuis 2023 et elle continue de s’étoffer de nouvelles créations à chaque édition. L’exposition est imaginée comme un cheminement mental chaotique dans les diverses dimensions du changement climatique (sciences dures, sciences sociales, économie, marketing, communication, politique, etc.).
Le propos semble partir dans tous les sens, à l’image des diverses réactions et postures prises par la sphère publique à l’énoncé des constats scientifiques. Évitement, déni, récupération commerciale, politique ou religieuse, tels sont les ressorts identifiés et utilisés par l’artiste dans nombre des créations proposées dans l’expo.
