Accueil > Actualités > Actualités scientifiques > Tempête tropicale en Méditerranée

Tempête tropicale en Méditerranée

30-11-2011

Une équipe du laboratoire d’aérologie (LA/OMP, CNRS/UPS), en collaboration avec une équipe du Laboratoire de météorologie dynamique (LMD/IPSL, CNRS / UPMC / École normale supérieure de Paris / École Polytechnique), a mis en évidence les principales conditions nécessaires au développement explosif d’une dépression méditerranéenne en tempête tropicale, telle celle qui s’est produite au début du mois de novembre occasionnant d’importants dégâts dans le sud-est de la France.

Quasiment chaque année et généralement à l’automne lorsque la mer Méditerranée est encore chaude, une dépression prend les caractéristiques d’une tempête tropicale avec des nuages enroulés autour d’un œil, une activité orageuse intense, des vents forts à la surface de l’eau et une température dans les basses couches atmosphériques plus élevée au cœur des nuages qu’à l’extérieur. Ce type de tempête qui peut éventuellement s’intensifier en cyclone (1) s’appelle "medicane" (contraction de "Mediterranean hurricane"). Le dernier medicane a eu lieu les 7 et 8 novembre 2011 au large des Baléares et a conduit à des vents atteignant plus de 130 km/h en rafales et à des vagues de 6 mètres sur les côtes varoises. Peu fréquent mais violent, ce phénomène peut provoquer des dégâts importants sur les côtes méditerranéennes densément peuplées.


Image de Météosat montrant le medicane au-dessus de la mer Adriatique le 26 septembre 2011 à 15h27 (TU).

Le medicane le plus intense jamais enregistré s’est produit le matin du 26 septembre 2006 au sud de l’Italie. La dépression initiale s’est formée la veille derrière l’Atlas algérien le long duquel elle s’est ensuite déplacée avant de rejoindre la Méditerranée via la Tunisie. Elle s’est ensuite développée de manière explosive (2) en medicane sur la mer Ionienne dans la matinée du 26. Le passage du medicane au-dessus de la Pouille méridionale quelques heures plus tard a permis que soit mesuré son creusement (diminution de la pression au cœur de la tempête) qui était très profond (986 hPa) et les rafales de vent qui atteignaient plus de 144 km/h. Bien que l’intensité du vent moyen n’ait pas atteint celle d’un cyclone (118 km/h), ce medicane a néanmoins été classé comme une tempête tropicale sévère.

Des chercheurs du LA et du LMD ont réalisé une série de simulations numériques de ce medicane avec le modèle météorologique Méso-NH à haute résolution. Ils ont constaté que pour le reproduire dans des conditions proches de la réalité, il fallait non seulement une situation fortement orageuse autour de la dépression mais aussi la présence d’un courant-jet (3) d’altitude : c’est le passage de la dépression sous le courant-jet qui conduit à son creusement explosif et au phénomène de medicane.

Les chercheurs ont aussi constaté que de petites modifications des conditions initiales suffisent à modifier radicalement l’évolution du système vers, ou non, un medicane, ce qui veut dire que ce type de phénomène est difficile à prévoir avec exactitude avec les modèles opérationnels dont la résolution est moindre que celle du modèle de recherche Méso-NH.



Notes :

  1. Un cyclone est une tempête tropicale dont la vitesse des vents dépasse 118 km/h
  2. À une latitude de 40°N, le développement d’une dépression est qualifié d’explosif lorsque la pression diminue de plus de 18 hPa par jour (1 hPa = 100 Pa et la pression au niveau de la mer est en moyenne d’environ 1 013 hPa).
  3. Un courant-jet est un vent fort, rapide et très confiné, qui circule entre 6 et 15 km d’altitude, soit au niveau supérieur de la troposphère. Sa vitesse peut atteindre plus de 300 de km/h au centre du flux.


Source :

Chaboureau, J.-P., F. Pantillon, D. Lambert, E. Richard, and C. Claud: Tropical transition of a Mediterranean storm by jet crossing, Quart. J. Roy. Meteor. Soc., doi :10.1002/qj.960, sous presse, 10 novembre 2011



Contacts :

Jean-Pierre Chaboureau , LA/OMP, Tél. : 05 61 33 27 50

Chantal Claud , LMD/IPSL, Tél. : 01 69 33 51 29

Retour à la liste actualités scientifiques