Accueil > Actualités > Actualités scientifiques > Les vols scientifiques d'étude des poussières émises par le volcan islandais Eyjafjöll

Les vols scientifiques d'étude des poussières émises par le volcan islandais Eyjafjöll

22-04-2010

Suite à la reconfiguration des avions ATR-42 de Météo-France et Falcon 20 du CNRS, avions mis en oeuvre par le Service des avions français instrumentés pour la recherche en environnement (SAFIRE, CNRS/INSU PARIS/CNES/Météo-France), un travail qui a nécessité plusieurs jours, les équipes scientifiques françaises ont procédé à des vols scientifiques les 20 et 21 avril. L'objectif de ces vols était de détecter la présence de particules, d'avoir une idée de leur taille et d'estimer leur concentration, moyennant des hypothèses sur leur densité et leur forme. Le Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE/IPSL) a développé un lidar spécifique pour cette occasion. D'autres vols sont en préparation.

Pour le premier vol du 20 avril, l'ATR-42 était équipé d'un compteur de particules, pour des tailles de particules allant de 0,1 à 300 µm. Aucun des capteurs utilisés ne permettaient de déterminer la nature des particules autrement que par leur taille, les cendres volcaniques étant plus grosses (2 à 5 µm) que les aérosols les plus fréquents.
L'avion a volé sur un parcours Toulouse-Montpellier-Montélimar-Lyon-Paris-Nantes-Limoges-Toulouse, tout au long duquel des mesures in situ ont été réalisées, qui ne sont naturellement représentatives que du trajet et de l'altitude de l'avion.


Les données du vol ont été dépouillées durant la nuit du mardi 20 au mercredi 21. Des premiers résultats obtenus, qui sont encore préliminaires, il ressort que :

  • toutes les particules détectées se situaient en dessous de 2 000 m d'altitude, dans la couche limite atmosphérique ; aucune particule n'a été détectée au-dessus de 3 000 m ;
  • à l'approche de Nantes et de Paris (Étampes, Chatillon), les analyses mettent en évidence, vers 1000 m d'altitude, la présence de particules un peu plus grosses, de 2 à 4 microns, probablement également d'origine volcanique ;
  • les concentrations estimées sont partout faibles, inférieures à 20µg/m3 en général, les valeurs les plus importantes restant inférieures à 80 µg/m3.

Ces résultats sont cohérents avec les observations réalisées à partir d'un lidar développé par la société LEOSPHERE et le LSCE au-dessus d'Orsay, par la station QUALAIR de l'Université Pierre et Marie Curie au-dessus du centre de Paris et par le site instrumenté de l'IPSL (SIRTA) au-dessus de l'Ecole polytechnique, qui tous ont détecté une couche de cendres vers 6 000 mètres d'altitude en début d'épisode, qui a progressivement sédimenté jusqu'à une altitude de 2 000 m où elle s'est stabilisée avant de se fondre dans la couche limite à partir du 18 avril. Les températures relativement chaudes en surface ont en effet conduit à l'extension de la couche limite de 1000 à 2000 mètres d'altitude, provoquant des mélanges entre les cendres volcaniques et les autres aérosols.


Ces premiers résultats semblent donc indiquer qu'actuellement, relativement protégée par des conditions météorologiques anticycloniques, la France n'est très probablement concernée que par de vieilles cendres ayant sédimenté vers les basses couches en se diluant progressivement et plus présentes dans la partie nord du pays.


Cette situation perdurera tant que les flux de nord n'amèneront pas de nouvelles cendres. L'arrivée sur la France, dans les prochains jours, de vents de sud-ouest puis de précipitations qui lessiveront les « vieilles » particules constitue un élément très favorable.


La nature des particules présentes à basse altitude devrait pouvoir être précisée lorsqu'elles atteindront le voisinage du sol par les analyses menées par l'INERIS à partir des observations réalisées par les associations agréées de surveillance de la qualité de l'air (AASQA).


Volan islandais : Lidar embarqué sur le Falcon 20

Système Lidar (LSCE/CEA) embarqué à bord du Falcon 20 de l'unité SAFIRE

A la demande de Météo-France, le CEA, via le LSCE, a par ailleurs développé spécifiquement un système lidar pour être embarqué sur avion (Figure 1). Ce système a été réalisé le lundi 19 avril avec l’aide de la société LEOSPHERE et a été utilisé pour sonder l'atmosphère au-dessus d'Orsay (cf ci-dessus). Après livraison du lidar à l’unité SAFIRE le mardi 20 avril, l’instrument a été embarqué dans le FALCON 20 pour y être testé. Il a effectué le vol opérationnel le 21 avril durant l’après midi. Le vol a duré environ 4 heures.

Le Falcon 20 embarquant le système lidar a décollé vers 14h de la base militaire de Francazal à proximité de Toulouse. Il a effectué un vol en continu en passant par Dijon, Strasbourg, Boulogne sur Mer, Dieppe, Caen, Amboise et est revenu sur Toulouse. L’altitude de vol de l’avion a été fixée à 7500 m au-dessus de l’altitude du panache identifiée par les systèmes lidar sol, dont ceux de Saclay (CEA) et Toulouse (Météo-France), et prévu par la cellule de prévision opérationnelle de Météo-France.


Les mesures effectuées dans l’ultraviolet à 355 nm ont permis de localiser les couches résiduelles du panache de cendres volcaniques. Vers 15h00, l’avion était au-dessus de la vallée du Rhin entre Mulhouse et Strasbourg. On peut observer sur la Figure ci-dessous une couche de particules entre le sol et 2 km d’altitude assez habituelle pour cette période de l’année. Un peu plus tard, entre Strasbourg et Boulogne-sur-Mer, on observe des couches fortement dépolarisantes entre 2 et 4 km d’altitude (voie perpendiculaire). La forte dépolarisation est très probablement associée à la présence des cendres volcaniques également localisées à ces altitudes par le système lidar de Saclay les jours précédents le vol. Ces données sont par ailleurs totalement consistantes avec celles du Falcon 20 allemand du DLR. Après 16h15, la présence de cirrus à l’altitude de vol de l’avion a fortement atténué l’intensité du signal lidar, ce qui rend beaucoup plus difficile la détection des couches de cendres volcaniques.


Ces données ont significativement aidé au processus de décision pour la réouverture de l’espace aérien.


Volcan islandais : Données du lidar

Observations du lidar embarqué sur le Falcon 20 de l’unité SAFIRE. La figure du haut présente le signal lidar pour la voie en polarisation parallèle (celle du laser). La figure du bas présente le signal lidar pour la voie en polarisation perpendiculaire.
Retour à la liste actualités scientifiques