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Création de grandes aires marines protégées dans l'Océan Austral

27-01-2017

Des chercheurs de l'Institut Pierre-Simon Laplace, en collaboration avec le CEBC ( Centre d'Etudes Biologiques de Chizé ), étudient la dynamique océanique et le comportement des prédateurs marins en support à la création de grandes aires marines protégées dans l'Océan Austral.

Au cours des dernières années une réorientation des politiques de conservation du milieu marin a eu lieu. Si les efforts étaient jadis concentrés sur les régions côtières et anthropisées, la tendance actuelle est de viser le milieu hauturier (comme témoignent la mise en place d’une Aire Maritime Protégée - AMP - au sein de la Mer de Ross ou l’extension des réserves naturelles des Terres Australes et Antarctiques Françaises ( TAAF ) en 2016.


Un obstacle majeur à la mise en place d’une Aire Maritime Protégée dans l’océan ouvert est sa nature dynamique. Contrairement aux écosystèmes côtiers, contraints essentiellement par la topographie, qui ne varie pas dans le temps, les organismes du milieu hauturier sont entrainés par des écoulements dynamiques, tels les tourbillons et les fronts, dont la variabilité temporelle se superpose à celle des processus écologiques. La position de ces structures physiques fortement dynamiques peut varier à l’échelle interannuelle de plusieurs centaines de km, et ainsi les régions écologiquement plus importantes. Cette difficulté est accentuée par des observations des organismes souvent effectuées sur une courte période, dont l’utilisation pour des AMPs d’une durée pluri-décennale est questionnable.


Reconstruction d'une région d'alimentation à partir de données multi-satellites et de trajectoires de prédateurs (gorfou macaroni).


Dans ce contexte, une équipe de chercheurs de l’IPSL, en collaboration avec le CEBC, a étudié les potentialités des analyses lagrangiennes (c'est à dire, basées sur des modèles de transport) appliqués à des données multi-satellites comme support pour la mise en place d’une AMP. Leurs analyses ont concerné l’Archipel de Crozet (secteur indien de l’Océan Austral). Une branche fortement dynamique du front subantarctique a été identifiée comme un important site d’alimentation via des analyses combinées de positions d'un prédateur clé du réseau trophique marin antarctique (Eudyptes chrysolophus, ou gorfou macaroni). Ces manchots ont été équipés par le CEBC avec des balises qui permettent de suivre leurs positions par satellite (télédetection). Cela a permis une analyse décennale de la position de ces structures en exploitant les données satellitaires historiques (1993-2002), de manière à extrapoler la position de cet habitat en dehors de la période où les observations des manchots étaient disponibles (2011). Une carte de densité a été ensuite utilisée pour identifier la position moyenne du site d’alimentation. L’étude en question a également permis d’estimer l’impact du changement climatique à venir sur la localisation de cet habitat. A cette fin, la position de celui-ci a été corrélée avec un mode régional de variabilité climatique, le Mode Annulaire Austral, dont l’index est réputé avoir une tendance positive selon la plupart des scénarios du changement climatique. Une étude plus étendue, basée sur des données de télédétection de plusieurs espèces, visant à intégrer des scénarios décennales du changement climatique, est actuellement en cours à l’IPSL, en support à la possible création d’une AMP en milieu hauturier au voisinage des TAAF examinée par la CCAMLR (Commission pour la conservation de la faune et la flore marines de l'Antarctique).



Source :

Lagrangian analysis of multi-satellite data in support of open ocean Marine Protected Area design, A. Della Penna, P. Koubbi, C. Cotté, C. Bon, C. Bost, F. d'Ovidio


Contact chercheur :

Francesco d'Ovidio , LOCEAN-IPSL


A voir : installation du comité consultatif des TAAF

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