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Séminaire

Se baigner à Paris ?

Jean-Marie-Mouchel

Cycle « Les grands séminaires IPSL ».

       

Date de début 22/01/2024 12:00
Date de fin 22/01/2024
Lieu Hybride Sorbonne Université et visio

Description

L’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques à Paris a mis en lumière un enjeu majeur et oublié depuis des décennies. Durant près d’un siècle la Seine a été oubliée. Historiquement l’objectif de l’assainissement a été d’évacuer les eaux le plus loin et le plus vite possible du centre de la ville. Au tout début du XXe siècle les eaux évacuées par le réseau pouvaient encore être épandues à des fins agricoles, mais l’expansion urbaine et la demande foncière ont rapidement eu raison de cette stratégie visant au recyclage des matières, et qui est devenue dépassée vers 1910. Depuis ce fut un flot toujours croissant d’eaux usées déversées sans traitement en Seine (et en Marne) jusque dans les années 1970, époque ou les berges de la Seine étaient aussi transformées en autoroute.

Le chemin a été long ensuite à partir de la loi sur l’eau de 1964 pour revoir l’efficience des réseaux, la capacité de traitement des usines d’épuration tout en accompagnant un accroissement urbain considérable. Ainsi le réseau d’assainissement est un objet en constante évolution dans sa structure, sa gouvernance et ses objectifs. Au cours des cinquante dernières années se sont combinés ou succédé plusieurs objectifs, allant de la lutte contre les rejets industriels à la collecte et au traitement des eaux municipales. Des séquences d’objectifs de plus en plus exigeants ont été élaborés par les politiques publiques, en ce qui concerne les eaux usées municipales il s’est agi surtout de réduire les rejets de matières organiques et d’ammonium  pour lutter contre les désoxygénations, de limiter les rejets de nutriments (azote et phosphore) pour lutter contre l’eutrophisation tout en étant de plus en plus vigilants à propos de micropolluants de plus en plus nombreux (des métaux aux contaminants organiques, biocides, résidus de médicaments etc.). Ces réglementations visent d’abord à améliorer la qualité écologique des cours d’eau avec une meilleure oxygénation, moins de matières nutritives pour réduire des efflorescences dévastatrices et moins de contaminants toxiques, et dans une moindre mesure à protéger la santé humaine en évitant l’apparition d’algues toxiques et la présence de contaminants que les filières de production d’eau potable auraient des difficultés à traiter, ou qu’on pourrait retrouver dans les produits de la pêche.

La problématique de la baignade est toute autre puisqu’il s’agit de protéger directement l’être humain en contact avec l’eau. Par ailleurs, la réduction de la contamination nécessaire à partir des eaux usées municipales est beaucoup plus importante, et l’exigence pour le traitement et la gestion des eaux usées beaucoup plus forte, et la vision que doivent maintenant avoir les gestionnaires de l’assainissement est complètement modifié. Pour s’en convaincre, notons que le rapport de concentrations entre une eau réputée de bon état en rivière et une eau usée municipale est de 3% pour la DBO5 (les matières organiques) ou l’azote, mais seulement de 0,01% pour les E. coli (indicateur bactérien de contamination fécale). Deux conditions doivent être réunies pour épurer 300 fois mieux : d’une part renforcer les filières d’épuration par des traitements de désinfection spécifiques (c’est en cours) d’autre part lutter contre tous les déversements d’eau non traitée car il faut en effet une étanchéité quasi-parfaite du réseau pour atteindre l’objectif de 0.01%. Et sur ce point, les rejets urbains de temps de pluie, qui sont des rejets nécessaires pour éviter l’engorgement du réseau en temps de pluie, semblent pousser le projet vers une impasse, au moins si l’on veut atteindre la baignabilité en tout temps.

Cet exposé présentera l’état des lieux des efforts réalisés et les perspectives d’évolution de la qualité de la Seine telles qu’on peut les modéliser.

 


Jean-Marie Mouchel est directeur de l’Unité Mixte de Recherche METIS-IPSL (Sorbonne Université/CNRS/EPHE) : Milieux environnementaux, transferts et interactions dans les hydrosystèmes et les sols.

 

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Informations supplémentaires

Le séminaire aura lieu de 12h à 14h.

Lieu
Sorbonne Université, Campus Pierre et Marie Curie
4, place Jussieu 75005 Paris
Centre International de Conférences de Sorbonne Université (CICSU)
Couloir 44-54, salle 109 – 1er étage

Visio
https://cnrs.zoom.us/j/92622869121?pwd=Skt1RWJyZXdCWmxkNVFxK3VESzVsQT09