Le changement climatique prédit pour le XXIe siècle aura un impact profond sur les écosystèmes. Les projections s’appuient sur des modélisations du fonctionnement écophysiologique des couverts, qui conjuguent l’effet d’une augmentation du dioxyde de carbone susceptible d’accroître la photosynthèse aux modifications liées directement à celles des facteurs climatiques dominants, au premier rang desquels la température et la pluviométrie.

La productivité agricole pourrait varier en 2080 de – 50 % pour les pays de l’hémisphère Sud à + 15 % pour ceux de l’hémisphère Nord. Il faudra également s’attendre à une évolution sensible des aires géographiques des cultures et des formations forestières, qui permettra leur extension vers le Nord (pour notre hémisphère), mais posera des problèmes face aux sécheresses et canicules accrues dans le Sud. Par ailleurs, il est difficile d’envisager une migration pour les terroirs, compte-tenu de leur lien aux conditions locales.

Le réchauffement récent a déjà permis d’évaluer en partie la pertinence de ces projections, même s’il est délicat d’isoler son action de celle d’autres facteurs. Il a été possible d’observer des impacts sur les écosystèmes cultivés ou naturels, en particulier au niveau de leur phénologie : pour la France, dates de semis du maïs, de floraison des arbres fruitiers, de moisson et de vendange, toutes avancées d’une à trois, voire quatre semaines.

Plus récemment, il a été possible de mettre en évidence une contribution, à des niveaux variables, dans l’augmentation du rendement de la betterave, du degré alcoolique du vin et de la productivité forestière, et à l’inverse dans à la stagnation du rendement du blé. Ces effets attestent de la réalité d’un climat actuel significativement différent de celui des années 1940-1970. Ils sont en bon accord avec ce que l’on pouvait attendre d’un réchauffement modéré, plutôt favorable dans nos climats tempérés. Il en irait différemment avec un réchauffement qui dépasserait les 2 à 3° C.

Bernard Séguin, directeur de recherche, responsable de la Mission « Changement climatique et effet de serre » de l’unité Agroclim de l’Inra d’Avignon.