WHIRLS : De petits tourbillons océaniques ayant un impact majeur sur le climat et la vie marine


Une équipe de recherche internationale reçoit une subvention Synergy de l’ERC pour un projet interdisciplinaire se focalisant sur le rôle de l’océan sur le climat.

La dynamique océanique à petite échelle joue un rôle important dans les échanges de chaleur et de carbone entre l’océan et l’atmosphère. Elle influence la capacité de l’océan à atténuer le changement climatique, ainsi que la manière dont l’océan est affecté par celui-ci. Financé par le Conseil européen de la recherche (ERC), le projet WHIRLS se concentre sur ces processus physiques de petite échelle et explore leur impact sur le climat, la biogéochimie marine et la biodiversité. Des océanographes spécialisés dans la modélisation d’Allemagne, de France, de Suède et d’Afrique du Sud travailleront ensemble pour améliorer notre compréhension ces processus afin de pouvoir améliorer notre capacité de prévision des changements futurs de nos océans et de notre climat.

 

Il est fondamental de résoudre les processus à petite échelle dans les modèles climatiques, améliorant ainsi leur précision afin de mieux prédire les changements climatiques et développer des solutions d’atténuation et d’adaptation adéquates. Sabrina Speich, professeur et responsable du projet à l’ENS-PSL/LMD-IPSL Paris.

 

La chaleur et le carbone jouent un rôle crucial dans la régulation du climat à l’échelle régionale et mondiale. L’océan absorbe d’importantes quantités de chaleur, ce qui limite les effets du réchauffement climatique. Lorsqu’il relâche cette chaleur dans l’atmosphère, le climat devient plus chaud et plus humide, et vice versa. Le carbone qui pénètre dans l’océan est transporté par les courants marins et absorbé par le phytoplancton, de minuscules plantes qui forment la base de la chaîne alimentaire marine et sont essentielles pour la biodiversité océanique. Le carbone ainsi absorbé par l’océan, il y reste pendant des siècles, contribuant à diminuer la concentration de gaz à effet de serre atmosphérique en atténuant le changement climatique.

 

Le NO Français Marion Dufresne II opérant dans l'océan au sud-ouest de l'Afrique lors d'une campagne de recherche menée par le Prof. S. Speich. Crédit : S. Speich, LMD et ENS

Le NO Français Marion Dufresne II opérant dans l’océan au sud-ouest de l’Afrique lors d’une campagne de recherche menée par le Prof. S. Speich. Crédit : S. Speich, LMD et ENS

 

Les échanges de chaleur et de carbone entre l’océan et l’atmosphère, ainsi que leur distribution dans l’océan, sont régis par de vastes courants océaniques, ainsi que des petits tourbillons et filaments. Le projet WHIRLS, financé par une prestigieuse subvention Synergie du Conseil européen de la recherche (ERC), se penchera sur ces processus à petite échelle. Pour cela, les professeurs Sabrina Speich de l’École normale supérieure de Paris, Arne Biastoch du GEOMAR Helmholtz Centre for Ocean Research Kiel (Allemagne), Sebastiaan Swart de l’université de Göteborg (Suède) et Sarah Fawcett de l’université du Cap (Afrique du Sud) collaboreront en développant une nouvelle approche scientifique. Le projet WHIRLS bénéficiera d’un financement de près de 12 millions d’euros sur une période de six ans.

« WHIRLS se concentre principalement sur des processus à petite échelle ayant un impact significatif à grande échelle », explique Sabrina Speich, océanographe physicienne au Laboratoire de Météorologie Dynamique de l’ENS. Les tourbillons sont des phénomènes qui se produisent sur des échelles inférieures à 100 kilomètres. Bien que cela puisse sembler insignifiant, ces processus ont un rôle majeur dans le contexte de l’océan mondial, et ils demeurent actuellement mal compris dans les observations océaniques et les modèles climatiques.

Le projet exploitera les technologies d’observation les plus avancées, qu’il s’agisse de mesures depuis des navires, de l’utilisation de robots ou de satellites. Il évoluera d’une perspective bidimensionnelle à une représentation tridimensionnelle de tous les processus physiques et biogéochimiques pertinents, en tenant compte d’échelles de temps allant de quelques jours à plusieurs saisons. WHIRLS se penchera sur l’observation, la modélisation et le suivi des interactions entre l’atmosphère, la surface de l’océan et les profondeurs océaniques. Il examinera des processus encore très mal connus tels que le mélange vertical ainsi que les transferts de chaleur, de nutriments et de carbone dans l’océan.

 

Un planeur robotisé sous-marin qui sera utilisé dans le cadre de WHIRLS sur le pont arrière du navire de recherche. Ces planeurs plongent à des profondeurs de 1 km toutes les 5 heures et effectuent des missions d'une durée de 6 à 12 mois. Ils mesurent des propriétés essentielles telles que les courants océaniques, la température, la salinité, la chlorophylle et l'oxygène. Crédit : Marcel du Plessis, Université de Göteborg.

Un planeur robotisé sous-marin qui sera utilisé dans le cadre de WHIRLS sur le pont arrière du navire de recherche. Ces planeurs plongent à des profondeurs de 1 km toutes les 5 heures et effectuent des missions d’une durée de 6 à 12 mois. Ils mesurent des propriétés essentielles telles que les courants océaniques, la température, la salinité, la chlorophylle et l’oxygène. Crédit : Marcel du Plessis, Université de Göteborg.

 

Les données recueillies seront utilisées pour développer et valider des modèles à haute résolution, répondant ainsi à l’urgence de représenter les processus à l’échelle du kilomètre dans nos modèles du système terrestre. Les résultats obtenus permettront d’améliorer les prévisions numériques du temps et les projections climatiques. Le projet WHIRLS s’inscrit dans la Décennie des Nations unies pour les sciences de la mer en faveur du développement durable, contribuant aux priorités scientifiques tant européennes qu’internationales.

La recherche se concentrera sur la région la plus énergétique du monde, le système du courant des Aiguilles autour de l’Afrique du Sud. Ce système de courants est exceptionnel en raison de sa circulation vigoureuse, des échanges très intenses de chaleur et de carbone entre l’océan et l’atmosphère, ainsi que de la diversité exceptionnelles de son écosystème marin. De plus, il joue un rôle central dans la circulation océanique mondiale et sur le climat à l’échelle régionale et mondiale.

 

Pour en savoir plus

Contexte : Subventions du Conseil européen de la recherche (ERC)

Le Conseil européen de la recherche (ERC), créé par l’Union européenne en 2007, est le premier organisme européen de financement de l’excellence en matière de recherche exploratoire. Il finance des chercheurs créatifs de toute nationalité et de tout âge pour mener des projets dans toute l’Europe. Le CER propose quatre programmes de subventions de base : Les subventions de démarrage (pour les scientifiques ayant récemment obtenu leur doctorat), les subventions de consolidation (pour les scientifiques en phase intermédiaire de leur carrière), les subventions avancées (pour les scientifiques chevronnés) et les subventions de synergie (pour les projets qui nécessitent de combiner l’expertise de plusieurs scientifiques de différents domaines).

Les subventions « Synergie » soutiennent la coopération entre chercheurs principaux afin de résoudre ensemble des problèmes de recherche ambitieux qui ne pourraient pas être résolus par les chercheurs principaux et leurs équipes travaillant seuls. Les projets permettent des avancées substantielles aux frontières de la connaissance, résultant par exemple de la fertilisation croisée de domaines scientifiques, de nouvelles lignes de recherche productives, ou de nouvelles méthodes et techniques, y compris des approches non conventionnelles et des recherches à l’interface entre des disciplines établies. Le CER est dirigé par un organe directeur indépendant, le conseil scientifique. Depuis le 1er novembre 2021, Maria Leptin est la présidente du CER. Le budget global du CER pour la période 2021-2027 s’élève à plus de 16 milliards d’euros, dans le cadre du programme Horizon Europe, sous la responsabilité du commissaire européen à l’innovation.

Quelques liens utiles

Contact
Sabrina Speich
, LMD-IPSL •

Sabrina Speich


Laboratoire de Météorologie Dynamique (LMD-IPSL)