Journée thématique "Cyclones et changement climatique"

Le séminaire scientifique "Cyclones et changement climatique" s'est déroulé le 6 février 2018 sur le campus Pierre et Marie Curie de Sorbonne Université. Il a inauguré la série de journées thématiques organisée dans le cadre de la Convention services climatiques et du LabEx L-IPSL . La Convention a été par signée entre le Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire et le CNRS.

Les interventions d’experts issus de différents laboratoires français ont permis de dresser un état des lieux des connaissances actuelles sur les cyclones et des défis scientifiques et techniques à relever pour aller de la recherche vers un service climatique. Il a été question des impacts et de la vulnérabilité, des processus biophysiques en jeu. La discussion finale a porté sur les méthodes de suivi et la projection pour le futur.

RETOUR SUR LE PROGRAMME

Étudier les impacts des cyclones pour mieux appréhender les trajectoires de vulnérabilité et d’adaptation des îles tropicales au changement climatique

Modélisation de la submersion marine liée aux cyclones au BRGM

Vulnérabilités aux cyclones tropicaux

Etude des processus en jeu. Mécanisme de formation des cyclones

Changements d’intensité

Couplage : interactions océan-atmosphère au sein des cyclones tropicaux

Effets du changement climatique sur les cyclones tropicaux

Les données climatologiques disponibles pour analyser l’activité cyclonique

Méthodes d’attribution des événements extrêmes. Possibilités et freins à leur utilisation sur les cyclones

Medicanes and climate change

Eye formation in Tropical Cyclones

Étudier les impacts des cyclones pour mieux appréhender les trajectoires de vulnérabilité et d’adaptation des îles tropicales au changement climatique

Virginie Duvat (UMR LIENSs, Université de La Rochelle)

• Forte vulnérabilité des îles tropicales aux cyclones
• Reconstruire et analyser les trajectoires de vulnérabilité et d’adaptation passées des systèmes côtiers pour connaître les facteurs de contrôle de la vulnérabilité
• L'utilisation d'images satellites à haute résolution permet de suivre différents indicateurs d'évolution du trait de côte
• La capacité et le temps de réajustement des systèmes côtiers aux impacts des cyclones sont extrêmement variables (de quelques mois à 10 ans)
• Les cyclones sont également des agents constructeurs (apports sédimentaires, exhaussement des côtes)

Modélisation de la submersion marine liée aux cyclones au BRGM

Sophie Lecacheux et Rogrigo Pedreros (BRGM)

• A proximité des côtes, l'effet du déferlement des vagues peut être aussi voire plus important que l’effet atmosphérique (vent et pression) en terme de surcôte
• La submersion peut se produire : par franchissement par paquets de mer (overtopping), par débordement (overflow), par rupture d’ouvrage (failure)
• La modélisation de la submersion marine nécessite une descente d'échelle jusqu'à 10m (overflowing) ou 1m (overtopping) et la représentation fine du territoire (topo, ouvrages, connections hydrauliques, bâtiments, rugosité), d'où des temps de calcul très longs

Vulnérabilités aux cyclones tropicaux

Christophe Menkes (IRD)

• Des recherches sur la modélisation des différents couplages (vent-vagues-courant, océan-atmosphère...) sont en cours
• En Nouvelle-Calédonie, démonstration de l'importance de la morphologie de la barrière de corail
• Effet sur l'écosystème forestier : densification avec des tiges moins épaisses et plus nombreuses ainsi qu’une diminution de la hauteur de la canopée. Temps de résilience  au passage d’un cyclone cat 5~ 1an.

Etude des processus en jeu. Mécanisme de formation des cyclones

Caroline Muller (IPSL-LMD)

• Conditions environnementales favorables à la formation d'un cyclone tropical : eaux chaudes (anormalement par rapport à la haute troposphère), faible cisaillement du vent, force de Coriolis (latitude supérieure à 5°), forte humidité en moyenne troposphère
• Facteurs additionnels : variabilité naturelle du climat, cycle de vie interne du cyclone
• Auto-agrégation : émergence spontanée de l’organisation spatiale de la convection nuageuse malgré les conditions homogènes de température océanique et sans effet Coriolis. Le facteur principal est le rayonnement thermique
• Des simulations à haute résolution permettent de simuler des ensembles de cas pour mieux comprendre les mécanismes d’intensification
• Des simulations à haute résolution permettent de simuler des ensembles de cas pour mieux comprendre les mécanismes de genèse et d’intensification des cyclones, et le lien possible avec l'auto-agrégation

Changements d’intensité

Franck Roux (Université Paul Sabatier, Toulouse)

• Un cyclone à l'équilibre a une structure symétrique
• L'œil est formé par une circulation forcée : le réchauffement par compression adiabatique au centre est à l'origine de la basse pression de l'œil
• En théorie le cyclone a la puissance potentielle d'une machine thermique contrôlée par la différence de température entre la surface océanique et la tropopause, mais celle-ci est perturbée par divers éléments :

         - anomalie du contenu en chaleur de l'océan superficiel ;

         - cisaillement du vent : di-symétrise le cyclone

         - cycle de remplacement du mur de l'œil (variabilité interne du cyclone)

• Pas de mesures directes, in situ de l'intensité des cyclones mais de nouveaux instruments comme les aéroclippers

Couplage : interactions océan-atmosphère au sein des cyclones tropicaux

Sébastien Masson (IPSL-LOCEAN) et Christophe Menkes (IRD)

• Influence du schéma de convection : deux modèles (KF, BMJ) donnent des résultats différents ; attention aux effets de paramétrisation
• Impact du couplage avec l'océan : déplacement des zones de cyclogénèse, diminution du nombre de cyclones avec couplage
• Impact de la stratification océanique : sensibilité en pré-mousson, variable selon les régions océaniques

Effets du changement climatique sur les cyclones tropicaux

Fabrice Chauvin (Météo-France/CNRM)

• Attention aux bases de données historiques hétérogènes
• Evolution conjointe depuis 1880 du nombre de cyclones et de l'oscillation atlantique multi-décennale (AMO)
• Les principaux résultats du GIEC indiquent une diminution du nombre global de cyclones associée à une augmentation du nombre de cyclones majeurs. Augmentation marquée, également, des pluies cycloniques.
• Les résultats du GIEC n'accordent qu'une "faible confiance" dans une éventuelle tendance observée de l'activité cyclonique
• Les projections indiquent une diminution du nombre total de cyclones mais une augmentation de ceux des catégories 4 et 5. Une légère augmentation de leur intensité et des pluies associées sont également des résultats robustes.
• A surveiller : changement trajectoires, lien avec la SST, effet des aérosols, modes de variabilité océan-atmosphère (AMO, AMM, ENSO)
• Autres sujets : lien avec le climat africain, intensification rapide, indices de cyclogénèse
• Etudes récentes :

         - augmentation des pluies liée à l’augmentation de la convergence d’humidité,

         - augmentation de l’activité cyclonique vers le nord ainsi que vers l’est de l’Atlantique,

         - dans le Pacifique allongement de la saison (juillet) et diminution de l’intensité des phénomènes.

• Transition extra-tropicale : la méthode de Hart se propose de suivre les systèmes suivant deux aspects de leur structure : symétrie/asymétrie, cœur froid/chaud.

Les données climatologiques disponibles pour analyser l’activité cyclonique

Jean-Michel Soubeyroux (Météo-France)

• Saison cyclonique 2017-2018 exceptionnelle sur les Antilles
•  Le seuil légal pour déclarer l'état de catastrophe naturelle est un vent maximal de 215km/h : il a été mesuré pour Irma à Saint-Barthélemy, mais les anémomètres ne résistent pas toujours aux passages des cyclones.
• Différentes bases de données sur les cyclones de type « Best Track » existent sur les différents bassins mais sont exploitables pour des études climatiques sur des profondeurs variables (1972 sur l’Atlantique Nord et le Pacifique Est mais seulement fin des années 1990 dans l'océan Indien (satellite géostationnaire seulement depuis 1998)
• Des bases de données sur les pluies quotidiennes disponibles depuis les années 1960 pouvant être mobilisées pour étudier l’évolution des extrêmes.

Encore beaucoup de travail à faire à l'échelle locale pour compléter les bases de données événementielles sur les cyclones.

Méthodes d’attribution des événements extrêmes. Possibilités et freins à leur utilisation sur les cyclones

Aurélien Ribes (Météo-France/CNRM)

• Attribution des changements de long terme à partir de l'étude de séries observées : recherche d’un changement statistique (détection); mise en évidence de la perturbation anthropique (attribution)
• Pour les cyclones : manque de séries homogénéisées, faiblesse du rapport signal sur bruit, réponse complexe (événements forts vs modérés)
• Pour un événement singulier, pas de causalité directe mais la probabilité d’occurrence ou l'intensité de l’événement peuvent avoir évolué à cause des activités humaines
• Attention à la caractérisation de l'événement étudié, ou de l'indicateur suivi

Les méthodes utilisées reposent sur de grands ensembles: l'application aux cyclones se heurte au manque de simulations incluant des cyclones réalistes (augmentation possible dans les années à venir)

Medicanes and climate change

Davide Faranda (IPSL-LSCE)

• Cycle de vie : Advection d’air froid, convection d’abord désorganisée qui s’organise à 500-1000km, perte de l’énergie possible la nuit (pas comme les cyclones tropicaux), propagation souvent d’ouest vers l’est
• Caractérisé par un cœur chaud pour au moins 10% de la trajectoire ; critère de vent à 850hPa ; pas de saison bien précise
• Occurrence : 1 ou 2 par an mais sur des régions peu peuplées ; 99 au total recensés, sans tendance sur la période historique
• Dans le futur, un réchauffement de 3° en Méditerranée pourrait conduire à des ouragans
• Simulations avec une résolution de 300m (modèle Icon)
• Approche par la méthode des analogues à partir des données NCEP : premiers résultats...

Eye formation in Tropical Cyclones

Poster de Ludivine Oruba (IPSL-LATMOS)