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Quantification des émissions de gaz à effet de serre résultant des contributions nationales de l'Accord de Paris

19-01-2018

Une nouvelle étude analyse les objectifs nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour l'horizon 2025-2030 exprimés par les contributions déterminées à l'échelle nationale (Nationally Determined Contributions, NDC). Elle estime que les NDC projettent les émissions mondiales dans une fourchette de 56,8 à 66,5 GtCO2eq/an d'émissions, ce qui est plus élevé que les estimations précédentes. La fourchette d'incertitude est plus large que la plupart de celles publiées jusqu'à présent, ce qui s'explique essentiellement par le fait qu'un ensemble de scénarios de PIB sont envisagés plutôt qu'un scénario unique pour les pays qui ont exprimé leur objectif comme une réduction de l'intensité carbone de leur économie. Cette étude, menée par Hélène Benveniste et ses collègues de l'Institut Pierre-Simon Laplace (IPSL), du Centre International de Recherche sur l'Environnement et le Développement (CIRED) et de l'Université Grenoble-Alpes est publiée dans Environmental Research Letters.

L'objectif de l'Accord de Paris sur le changement climatique est de maintenir l'augmentation de la température mondiale bien en deçà de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels. Les mesures d'atténuation prévues par l'Accord de Paris reposent sur les contributions déterminées à l'échelle nationale (Nationally Determined Contributions, NDC), qui résument les objectifs nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) pour l'horizon 2025-2030.


Un petit nombre d’études ont estimé les niveaux globaux d'émissions qui résulteraient des NDC en 2030. Comme résumé dans le “Gap Report” 2017 du PNUE, ils se situeraient dans une fourchette de 49,5 à 56,2 Gt CO2eq/an (contre 51,9 Gt CO2eq/an aujourd'hui, et un niveau compatible avec l'objectif de 2°C estimé à environ 42 CO2eq/an en 2030), ce qui a conduit les auteurs du rapport à conclure que "l'écart entre les réductions nécessaires et les engagements nationaux pris à Paris est alarmant".


Une nouvelle étude, publiée dans Environmental Research Letters, montre que cette mise en garde est peut-être encore une sous-estimation de la situation. L'étude, menée par Hélène Benveniste et des collègues de l'Institut Pierre-Simon Laplace, du Centre International de Recherche sur l'Environnement et le Développement et de l'Université Grenoble-Alpes, a conduit l'analyse des NDC à un niveau très désagrégé (103 pays sont traités individuellement et tous les pays sont pris en compte). Elle fournit une analyse des sources d'incertitude et de leurs impacts sur les émissions mondiales de GES en 2030, basée sur la réalisation unique et complète des NDC. Elle estime que les NDC projettent les émissions mondiales dans une fourchette de 56,8 à 66,5 GtCO2eq/an d'émissions (intervalle de confiance de 90 %), ce qui est plus élevé que les estimations précédentes et avec une marge d'incertitude plus grande.


La fourchette d'incertitude est plus large que la plupart de celles publiées jusqu'à présent, ce qui s'explique essentiellement par le fait qu'un ensemble de scénarios de PIB sont envisagés plutôt qu'un scénario unique pour les pays qui ont exprimé leur objectif comme une réduction de l'intensité carbone de leur économie.


L'estimation est également plus élevée que les estimations précédentes parce que, contrairement aux études antérieures, elle ne tient pas compte de l'impact des politiques actuelles qui ne sont pas (encore) reflétées dans l’objectif NDC. L’estimation porte sur le niveau absolu des émissions de GES qu'impliquent littéralement les NDC. Il est concevable que les tendances économiques actuelles et/ou les politiques actuelles se traduisent par des émissions plus faibles que celles qu'impliquent les NDC pour certains pays. Inversement, certains autres pays pourraient enregistrer des émissions plus élevées que prévu. L'analyse permet donc de savoir ce que seraient les émissions si les objectifs des NDC étaient pris en compte "à leur valeur nominale", c'est-à-dire s'ils étaient exactement atteints. Ces informations peuvent être utilisées pour mettre en évidence la nécessité de mettre à jour les NDC et pour suivre la manière dont les révisions des NDC réduiraient les émissions de 2030 et l'incertitude associée. Par exemple, la Chine a présenté une cible d'intensité plutôt conservatrice dans son NDC, et certains analystes estiment qu'elle pourrait être dépassée.


En dépit de ces incertitudes, l'étude montre que les NDC déplacent fortement les émissions de GES vers les pays émergents et en développement et réduisent les inégalités internationales en termes d'émissions de GES par habitant.


Afin d'exploiter les points forts de la méthodologie, à savoir sa haute résolution par pays, sa flexibilité et sa transparence, les projections et le code sont mis à la disposition pour reproduire, améliorer ou mettre à jour l'analyse. En suivant les émissions de GES et en les comparant aux projections, il sera possible d'évaluer quels NDCs sont en voie d’être atteints, dépassés ou au contraire non-atteints. Cette approche permet également de mettre à jour les projections d'émissions lorsque de nouvelles données seront disponibles ou lorsque de nouveaux NDC seront soumis dans le cadre du processus de “bilan mondial” de l'Accord de Paris et de révision des NDC.


Figure présentant les trajectoires types d’émissions de gaz à effet de serre pour différents niveaux de réchauffement climatique et intervalle d’émissions résultant des engagements des pays exprimés dans les NDC. L’écart entre notre évaluation et celle de l’UNEP provient du fait que l’UNEP inclut des modélisations des changements en cours alors que nous ne considérons que les engagements en émissions explicités dans les NDC. GICN, UNEP



Pour en savoir plus

The NDC app: Estimating GHG emissions in 2030



Source

Impacts of nationally determined contributions on 2030 global greenhouse gas emissions: uncertainty analysis and distribution of emissions , Hélène Benveniste, Olivier Boucher, Céline Guivarch, Hervé Le Treut, and Patrick Criqui, Environ. Res. Lett., Vol. 13,  014022, 2018.



Hélène Benveniste , IPSL et Woodrow Wilson School, Université de Princeton (USA)

Céline Guivarch , Centre International de Recherche sur l’Environnement et le Développement (CIRED)

Olivier Boucher , Institut Pierre-Simon Laplace (IPSL), Tél. : 01 44 27  47 63

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