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La circulation océanique aurait contribué au premier peuplement de l’Amérique du Nord

11-12-2020

Selon une étude internationale à laquelle ont participé des chercheurs du LSCE-IPSL (CEA-CNRS-UVSQ), une modification importante des courants marins dans le Pacifique Nord aurait favorisé la première migration humaine de l'Asie vers l'Amérique du Nord, à la fin de la dernière période glaciaire.

Totalisant près de la moitié de l'eau des océans, le Pacifique constitue un vaste réservoir de chaleur et de CO2. Cependant, la circulation lente du Pacifique Nord freine aujourd'hui les échanges thermiques avec les autres régions et modère l'impact climatique de cet océan aux hautes latitudes.


Grâce à des carottes de sédiments marins prélevées au fond de l'océan, des chercheurs ont pu reconstituer la circulation et le climat du Pacifique Nord au cours du dernier maximum glaciaire, il y a environ 20 000 ans. La circulation était radicalement différente de celle d'aujourd'hui : de puissants courants réchauffaient alors la région entourant la mer de Béring actuelle. La découverte de ce réchauffement, créant des conditions favorables à des implantations humaines, contribue à résoudre le mystère du premier peuplement de cette zone.


Selon les études génétiques, les premiers habitants des Amériques ont vécu sans échanges avec d'autres humains, pendant plusieurs milliers d'années, au plus fort de la dernière période glaciaire, avant de migrer sur le continent américain. Cette hypothèse appelée "Beringian Standstill" soulève une question importante : où vivait cette population après sa séparation avec ses cousins asiatiques et avant sa migration à travers l'Amérique (permise par la déglaciation) ?


Les nouvelles recherches suggèrent que ces premiers Américains ont pu vivre dans un refuge relativement chaud, au sud de la Béringie, sur les terres désormais submergées par la mer de Béring.


Coupes Sud-Nord de l'océan Pacifique pour l'époque moderne (à gauche) et le dernier maximum glaciaire (à droite). À l'époque actuelle, la circulation supérieure est plus faible et la circulation profonde est plus active et plus étendue verticalement que lors du dernier maximum glaciaire. À cette dernière époque, un courant de surface plus important qu'aujourd'hui réchauffait les hautes latitudes de cet océan. Par ailleurs, un océan plus stratifié favorisait le stockage du CO2 atmosphérique.


« Les courants chauds révélés par nos données ont pu créer un climat beaucoup plus agréable que ce que nous pensions auparavant, détaille Will Gray, chercheur au LSCE. Dans les régions côtières du Pacifique Nord, ce climat plus doux a pu favoriser des écosystèmes plus tempérés et permettre aux hommes de survivre à une période glaciaire très hostile. D'autre part, nos simulations numériques montrent que les changements de la circulation océanique au cours de la période glaciaire auraient augmenté la capacité de l'océan à piéger le CO2 en profondeur, contribuant à la baisse du CO2 atmosphérique observée au cours de la période glaciaire. »


Ce travail montre à quel point le système climatique de la Terre est dynamique : les changements de circulation de l'océan et de l'atmosphère peuvent avoir des impacts majeurs sur l'habitabilité d'une région. Cette approche est pertinente pour comprendre comment différentes régions seront affectées par le changement climatique à l'œuvre. Ces travaux ont été conduits par la School of Earth and Environmental Sciences de St Andrews (Écosse).


Pour en savoir plus :

Référence

​J. W. B. Rae , W. R. Gray, R. C. J. Wills, I. Eisenman, B. Fitzhugh, M. Fotheringham, E. F. M. Littley, P. A. Rafter, R. Rees-Owen, A. Ridgwell, B. Taylor and A. Burke. Overturning circulation, nutrient limitation, and warming in the Glacial North Pacific , Science Advances.


Contact

W. R. Gray, LSCE-IPSL - william.gray @ lsce.ipsl.fr


Source : CEA .

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