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Quand l’évolution atmosphérique d’un composé soufré nous renseigne sur la capacité des plantes à capter le dioxyde de carbone libéré par les êtres humains.

06-04-2017

Le dioxyde de carbone (CO2) atmosphérique est un substrat essentiel qui permet aux plantes terrestres de croître, la photosynthèse étant le mécanisme biochimique via lequel ce gaz est assimilé par les plantes. En s’appuyant sur des simulations informatiques et des mesures, dans les glaces de l’Antarctique, de l’évolution atmosphérique d’un composé soufré (OCS) analogue au CO2, une équipe de scientifiques américains et européens, coordonnée par un chercheur de l’Université de Californie à Merced, a mis en évidence un aspect méconnu de l’action à grande échelle de l’être humain sur la nature puisque l’assimilation du CO2 par les plantes a cru d’environ 30% au cours du XXème siècle. Leurs travaux ont été publiés dans Nature, le 6 avril 2017.

L’oxysulfure de carbone (OCS) est le composé soufré gazeux le plus abondant de l’atmosphère de notre planète, même si sa concentration est très faible, de l’ordre de 500 pptv (soit 0,00000005 % du réservoir atmosphérique). Ce composé intéresse les scientifiques parce qu’il se comporte comme le CO2 : il est assimilé par les plantes de la même façon que le CO2, au moment de la photosynthèse, et les variations de sa teneur dans l’atmosphère pourraient nous permettre d’en savoir plus sur l’évolution de la photosynthèse au cours des dernières décennies. 


Les prélèvements d’air réalisés à la fois dans les bulles emprisonnées dans les glaces de l’Antarctique et dans l’atmosphère au-dessus de ce continent ont permis de reconstituer depuis la moitié du XVIIIème siècle jusqu’à nos jours les variations de la teneur atmosphérique de l’OCS. Incontestablement à la hausse (+70% en plus de deux siècles) en raison des émissions industrielles d’OCS, issues de la combustion du charbon, de la fabrication de l’aluminium et de la viscose, la tendance s’est inversée depuis les années 1990.

Un regard sur l'augmentation de l'activité photosynthétique des plantes terrestres au cours du XXème siècle au travers des archives glaciaires de l'oxysulfure de carbone (OCS) atmosphérique.


En recherchant la meilleure combinaison possible de puits et de sources d’OCS, permettant d’expliquer la tendance atmosphérique observée, les auteurs de l’article publié dans la revue Nature, dont plusieurs scientifiques du Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement (LSCE-IPSL), ont montré qu’il fallait associer aux émissions industrielles une forte augmentation du puits d’OCS lié à la photosynthèse des plantes terrestres. Ils en concluent que la production primaire brute des végétaux s’est trouvée stimulée à l’échelle globale dans des proportions voisines de +30% en un siècle en réponse à l’augmentation du CO2 et au changement climatique qui en résulte. Cette stimulation de la production primaire brute par le CO2 explique donc en grande partie le fait que les plantes soient capables de capter aujourd’hui environ un quart de nos émissions anthropiques de CO2.


Ce nouveau résultat va permettre de mieux contraindre les modèles numériques qui calculent l’évolution conjointe du climat et du cycle du carbone en réponse aux émissions anthropiques de CO2, donc de mieux contraindre les projections climatiques. En effet, la façon dont la photosynthèse répond aux variations du CO2 atmosphérique est l’un des termes les plus incertains prescrits dans ces simulations de changement climatique, l’oxysulfure de carbone nous aide donc à réduire cette incertitude.  


Cette capacité des plantes à absorber plus de CO2 au cours du vingtième siècle ne présage pas forcément de l’avenir puisque des facteurs susceptibles de limiter l’effet fertilisant du CO2 atmosphérique ont récemment été identifiés.


 

Source 

Large historical growth in global terrestrial gross primary production, Nature, 544, 84–87, 6 avril 2017.



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Source : INSU

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