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Variabilité de la salinité de surface et des précipitations au voisinage des zones de convergence atmosphérique de l’Atlantique et du Pacifique tropical

28-08-2015

Des chercheurs de la Chaire internationale de physique mathématique et applications (CIPMA-UNESCO, Cotonou, Bénin), du Laboratoire d’études en géophysique et océanographie spatiales (LEGOS/OMP, UPS / CNRS / CNES / IRD) et du Laboratoire d’océanographie et du climat : expérimentations et approches numériques (LOCEAN/Ecce Terra, UPMC / CNRS / MNHN / IRD / IPSL) ont étudié la variabilité spatio-temporelle, au cours des 30 dernières années, des zones de convergence atmosphérique de l’Atlantique et du Pacifique tropical, à travers leur signature en précipitation et des zones de faible salinité de surface de la mer. Pour ce faire, ils ont notamment utilisé les observations in situ de salinité de surface compilées par le service d’observation "Sea surface salinity" (SSS) du LEGOS. Ils ont ainsi pu mettre en évidence, à différentes échelles de temps, des décalages spatiaux et/ou temporels dans les déplacements de ces deux types de zone.

Les océans tropicaux Atlantique et Pacifique se caractérisent, en moyenne, par la présence d’alizés de Sud-Est dans l’hémisphère sud et d’alizés de Nord-Est dans l’hémisphère Nord. Ces deux systèmes de vent se rencontrent en deux lieux :

  • dans l’Atlantique et dans le Pacifique Nord entre 5°N et 10°N, où ils définissent une zone dite de convergence intertropicale (ZCIT),
  • dans le Pacifique Sud-Ouest entre 5°S et 15°S, où ils définissent une zone dite de convergence du Pacifique Sud (ZCPS).


Il existe donc une seule zone de convergence atmosphérique dans l’Atlantique 1 mais deux dans le Pacifique. Ces deux zones de convergence atmosphérique, aussi appelées "pot au noir" par les marins, sont caractérisées par des mouvements convectifs ascendants très énergétiques, dus à la rencontre des vents et à la chaleur des eaux océaniques sous-jacentes, convection qui s’accompagne d’importantes formations de gros nuages conduisant à de fortes pluies. Au niveau de ces zones de convergence, les eaux océaniques de surface sont donc en première approximation peu salées du fait des fortes pluies. Ces zones de convergence atmosphérique sont donc des zones de précipitations maximales et en première approximation des zones de salinité de surface minimale. Ces zones se prolongent sur les continents et jouent, entre autres, un rôle essentiel dans le régime des pluies océaniques et continentales.


Dans une étude récente, des scientifiques de la CIPMA, du LEGOS et du LOCEAN ont analysé les déplacements de ces zones de convergence au cours des 30 dernières années, à travers leur signature en précipitation et en salinité de surface. Ces analyses ont été réalisées pour l’essentiel à partir d’observations satellitaires de pluie (et de calculs d’évaporation effectués notamment à partir de mesures satellitaires des vents) et des observations in situ de salinité de surface compilées par le service d’observation labélisé  2 "Sea surface salinity" (SSS) du LEGOS.


Les chercheurs ont ainsi pu montrer que les positions moyennes sur les 30 dernières années du maximum de pluie et du minimum de salinité de surface ne coïncidaient pas, les positions moyennes du minimum de salinité étant décalées de 100 à 200 km vers le nord par rapport aux positions moyennes du maximum de pluie, et que cela était dû aux courants de surface.

Distribution spatiale moyennée sur 31 ans (1979-2009) de la salinité de surface (en haut) et du bilan Evaporation moins Précipitation (E-P, en mm/jour) (en bas). Les traits noirs en pointillé (hors l’équateur) représentent les positions moyennes des zones de minimum de salinité de surface (en haut) et de minimum du bilan E-P (en bas)


Les chercheurs ont également montré que dans l’Atlantique, le Pacifique Est et le Pacifique Sud-Ouest, les zones de convergence atmosphérique, vues à travers leur signature en précipitation, et les zones de minimum de salinité se déplaçaient en phase sur plusieurs centaines de kilomètres au Nord de leur position moyenne (sur 30 ans) pendant l’été boréal et au Sud pendant l’hiver. En revanche, les chercheurs ont été surpris de constater que dans le Pacifique Central et le Pacifique Nord-Ouest, ces déplacements saisonniers ne se faisaient pas en phase, celui des zones de minimum de salinité s’inversant. Ils ont également mis en évidence que les modulations d’une année à l’autre de ces déplacements saisonniers étaient liées aux grands modes climatiques de l’Atlantique et du Pacifique (Mode atlantique méridien, El Niño / Oscillation Australe).

Déplacements en latitude, exprimés en degré latitude par 31 ans, des positions des zones de minimum de salinité de surface (SSS) et de minimum du bilan Evaporation moins Précipitation (E-P) associées à la zone de convergence atmosphérique du Pacifique Sud (ZCPS) au cours de la période 1979-2009. Les incertitudes sur ces déplacements sont représentées par la largeur des enveloppes autour de chaque courbe.


Les scientifiques se sont aussi intéressés aux modifications à long terme (30 dernières années) du déplacement en latitude de ces zones de convergence atmosphérique et de minimum de salinité. Il s’avère que les zones de convergence atmosphérique, vues à travers leur signature en précipitation, ont eu tendance à s’écarter de l’équateur de plusieurs dizaines de kilomètres en direction des pôles. Ces mouvements traduiraient un déplacement de la partie ascendante de la cellule atmosphérique dite de Hadley, qui redistribue l’énergie accumulée des basses vers les hautes latitudes, déplacement qui pourrait être liée au fait qu’au cours des dernières décennies, le réchauffement de la température de surface des océans a été plus marqué au-delà des zones de convergence que dans la bande équatoriale. Il s’avère également que, concernant les zones de faible salinité de surface, seule celle située sous la zone de convergence du Pacifique Sud (ZCPS) s’est déplacée et ce de plusieurs centaines de kilomètres vers le Sud, probablement en lien avec une augmentation des alizés dans la bande équatoriale du Pacifique Centre-Ouest (et au courant de surface méridien dit d’Ekman induit).



Notes : 

  1. Certains chercheurs définissent parfois une deuxième zone de convergence dans l’Atlantique, qu’ils situent dans l’Atlantique Sud, au large du Brésil.
  2. Les données de ce service d’observation sont obtenues à partir de capteurs (des thermosalinographes) installés sur des navires marchands. Pour en savoir plus, voir le portail web .


Références : 

Tchilibou M., T. Delcroix, G. Alory, S. Arnault, and G. Reverdin. Variations of the Tropical Atlantic and Pacific SSS minimum zones and their relations to the ITCZ and SPCZ rain bands (1979-2009). J. Geophys. Res., 120, 5090-5100, doi:10.1002/2015JC010836.



Contacts :

- Sabine Arnault , LOCEAN, Tél : 0144274971

- Gilles Reverdin , LOCEAN, Tél : 0144272342



Source : INSU

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